L'affaire de torture dont le jeune Mehdi Sari a été victime mercredi dernier à l'intérieur de la résidence d'Etat de Moretti, sur la côte ouest d'Alger, n'est pas près de connaître son dénouement. Sur les huit agresseurs dûment reconnus par la victime, seulement trois sont entre les mains de la Gendarmerie nationale. Le premier, Amine Melzi, fils du directeur général de l'Etablissement de gestion touristique du Sahel, est en garde à vue à la brigade de Bouchaoui depuis samedi dernier. Il est identifié par le jeune Sari comme l'un des deux principaux commanditaires de l'homicide. Le second, Sofiane Zabour, fils d'un industriel connu, est en fuite à Paris. Il s'est envolé vers la capitale française jeudi dans la soirée. Selon le colonel Alioua de la Gendarmerie nationale, qui a confirmé cette information, le fils Zabour a réussi à prendre le large au moment où l'enquête n'était pas encore diligentée. “Immédiatement après l'ouverture d'une information judiciaire par le procureur de la République, nous avons entamé une vaste opération de recherches de toutes les personnes impliquées”, assure notre interlocuteur. Hier en fin d'après-midi, deux des agresseurs se sont rendus à la brigade de Bouchaoui. L'un répondant au nom de Rezzaz serait le fils d'un cadre supérieur à la Présidence, alors que le second, dit Bob, est propriétaire d'une agence de voyages. Il reste maintenant à retrouver les autres car le temps presse. Un délai légal de quarante-huit heures est accordé à la gendarmerie pour boucler son enquête préliminaire. Mais d'ores et déjà, elle entend obtenir un sursis afin d'interpeller la totalité des suspects. Les faits retenus contre eux dépassent tout entendement. Enlèvement, séquestration, torture, tentative de viol, défenestration avec préméditation de meurtre… la liste des chefs d'inculpation risque d'être longue. D'après Lakhdar Touhami, ancien résidant de Moretti, ce genre de pratiques ne sont pas inédites dans l'enceinte des résidences d'Etat, transformées en véritables zones de non-droit. “Une fois, au cours d'une soirée, M. Melzi s'est même vanté d'avoir fait justice lui-même en livrant à ses hommes de main des cambrioleurs de pavillons”, raconte cet ex-locataire. De tels forfaits étaient-ils possibles alors que le site fourmille de gendarmes ? Dans l'affaire Sari, le colonel Alioua défend énergiquement ses éléments. “L'agression a commencé hors de Moretti. Et puis la résidence dispose de ses propres agents de sécurité. Ces derniers ont reconnu la voiture du fils du directeur et l'ont laissé passer”, souligne l'officier. Cette condescendance a failli avoir raison de l'existence de Mehdi Sari. Son courage et la grâce de Dieu lui ont permis de survivre. “S'il était décédé, on aurait mis ça sur le compte de terroristes ou de bandits”, dit sa mère. S. L.