"Celui qui jeûne le mois de Ramadhan, mû par sa foi et en l'espérance de la récompense de Dieu, tous ses péchés antérieures lui seront pardonnés" (rapporté par al-Bukhârî et Muslim). Après avoir inscrit la tradition et la pratique du jeûne dans la continuité des grandes filiations religieuses et du cycle des prophéties et rappelé les liens très étroits entre le Coran et le mois de Ramadhan (6), le Prophète (psl) insiste dans ce hadith sur les dimensions spirituelles du Ramadhan. C'est le mois de la purification du cœur et du corps et l'approfondissement de la foi mais ce mois et c'est essentiel, le mois du pardon et l'absolution des péchés, tous les péchés mis à part bien sûr l'associationnisme (Shirk 7). Le monde dans lequel nous vivons donne parfois un peu le vertige. Il est ultra-rapide, exigeant et souvent intolérant face aux erreurs que nous pouvons commettre. On s'habitue vite, très vite aux bruits et à la frénésie de vie, à la consommation et la recherche frénétique du profit. On finit par s'éloigner, oublier, s'oublier et commettre des fautes. Comme tous les êtres humains, nous sommes inconstants, négligeants et fragiles. Un mois par an, le Ramadhan nous impose une pause spirituelle. Il nous invite à nous exiler à l'intérieur de nous-mêmes, à nous arrêter pour prendre le temps de réfléchir, méditer et tenter de nous réconcilier avec nous-mêmes. Tout est fait en ce mois pour nous libérer de la prison des habitudes, de la consommation et de l'oubli. Tout devient possible à l'approche de ce mois béni ou les forces du mal sont enchaînées et toutes les portes de l'enfer sont fermées, sans exception, comme le dit le prophète (Psl) : "Quand vient Ramadhan, les portes du paradis (ou du ciel ou de la miséricorde) sont ouvertes, les portes de l'enfer sont fermées, et les démons sont enchaînés" (rapporté par Al-Boukhârî et Muslim). Dieu accompagne, pardonne et protège ceux qui cherchent Son amour, Sa confiance et Sa miséricorde qui "embrasse toute chose" (Coran 7/156). Il n'existe pas un phénomène de la création sur terre comme dans l'au-delà qui n'exprime, ne traduise, ne respire ou ne révèle la miséricorde divine. Tout dans l'Univers exprime cette miséricorde. Quand nous faisons une erreur et que nous demandons pardon à Dieu et que Dieu nous pardonne, nous ressentons le poids de notre faute et nous apprenons par la même occasion que Dieu est "Ghaffar" (Très pardonnant), qu'Il est "Ghafour" (Tout Pardonnant), ou "Tawab", qui accueille le repentir de ses serviteurs. L'imam as-Sakandari (8) a une parole très juste à ce propos. Il dit : "Il se peut que Dieu inscrive dans ta destiné un péché qui sera la cause de ton salut final." Autrement dit, une faute, un acte de désobéissance ou un péché faisant naître chez nous un sentiment d'humilié, de regret et d'indulgence de l'âme devant Dieu est meilleur qu'un acte faisant naître en nous un sentiment de considération et d'orgueil. Nous l'avons dit, le Ramadhan est un mois propice au changement et la réforme de soi. Pendant ce mois de liberté, il faudra parler peu et méditer plus, manger moins et apprendre à se contrôler, à maîtriser son corps pour libérer son coeur. Il faudra surtout savoir pardonner pour se libérer du poids de l'amertume, de la haine et de la tristesse et parce que nous avons-nous même beaucoup à nous faire pardonner et que Dieu pardonne à qui pardonne. C'est bien, l'esprit du ramadan. Vivre l'esprit du Ramadan, c'est être le témoin (ou plutôt le devenir) de sa spiritualité dans un monde atteint par le vertige de la consommation, c'est rompre avec les habitudes qui emprisonnent et approfondir le pardon, c'est faire le bien et résister au mal, c'est enfin être proche de ceux qui sont dans le besoin, ceux qui souffrent, ceux dont les visages sont marqués par les difficultés de la vie. 6 - Voir nos articles du 18/06/2015 et 19/06/2015. 7 - Shirk (l'associationnisme) : le fait d'associer quelqu'un ou quelque chose à Dieu et lui vouer culte et adoration (22/31), c'est le seul péché que Dieu refuse de pardonner. 8 - Ibn ‘Ata' Allah as-Sakandari : Il naquit à Alexandrie (Egypte) entre 1250 et 1260 et mourut au Caire en 1309. Voir son livre : La sagesse des maîtres soufis (édition Grasset). G. A.