Les crises cycliques qui l'a secouent montrent que l'organisation de la filière est loin d'être achevée. L'Algérie est le deuxième plus grand importateur de poudre de lait dans le monde. Chaque année, l'Algérie paye une lourde facture pour alimenter le marché national, qui n'arrive toujours pas à s'autosuffire localement. Pourtant, l'Etat a indéniablement mis des moyens colossaux sur la table pour stimuler la production laitière. La stratégie adoptée par les pouvoirs publics pour le renforcement de la production locale et la réduction de la facture des importations en lait et produits laitiers est axée sur le renouvellement du cheptel de bovins laitiers afin de parvenir à en améliorer les rendements, le recours à l'importation de vaches laitières, motivé par le faible rendement des races locales qui ne dépassent pas la moyenne des 15 litres/tête/jour. Mais entre la réalité du terrain et la volonté d'augmenter la production nationale, l'écart est important. En effet, le point faible de cette politique volontariste, et sans doute la cause de ses résultats modestes, réside dans le manque d'accompagnement technique des éleveurs. Seuls les vétérinaires de terrain assurent en partie ce rôle de conseil. Il est vrai que la production de lait a progressé sensiblement depuis la fin des années 2000, mais, parallèlement, la demande s'est accrue encore plus vite et les importations de poudre ne cessent d'augmenter. La production est atomisée, avec un grand nombre de petites exploitations (quatre vaches en moyenne), qui manquent de ressources fourragères et sont peu productives (1000 à 1500 litres par vache). Même les vaches à fort potentiel importées d'Europe depuis de nombreuses années, qui représentent près de 30% du cheptel national, ne produisent pas plus de 3500 litres de lait en moyenne car elles sont souvent confrontées à des conditions d'élevage difficiles. De plus, si l'Algérie produit 2,2 milliards de litres de lait de vache, moins d'un tiers est collecté par l'industrie laitière. La plus grosse partie de la production est consommée localement ou donnée aux veaux. Faute de lait cru disponible et par facilité, l'industrie a utilisé pendant longtemps du lait reconstitué. Autre problématique, la couverture des besoins alimentaires du cheptel (ovin et bovin). En effet, l'avenir de la filière laitière repose essentiellement sur le développement de la production fourragère, fortement déficitaire. Plus de la moitié des besoins énergétiques et les deux tiers des besoins en protéines des bovins élevés en Algérie sont couverts par des aliments concentrés. La régression des surfaces des fourrages cultivés en Algérie ces dernières années a conduit à des tensions sur les fourrages, obligeant les éleveurs à utiliser des ressources limitées. Les ressources fourragères pour développer l'élevage bovin s'amenuisent, d'où la sous-alimentation du cheptel. Ce qui explique entre autres la faiblesse des rendements. La production nationale moyenne est de 4500 litres par vache/an, alors qu'on pourrait arriver à 6000 litres. Deuxième produit alimentaire le plus consommé en Algérie après les céréales, avec une moyenne de plus de 120 litres/habitant/an, le lait et ses dérivés coûtent à l'Algérie habituellement plus d'un milliard de dollars d'importations par année. Selon les statistiques des Douanes algériennes (Cnis), la valeur globale des importations de l'Algérie en produits laitiers est estimée à 1,91 milliard dollars en 2014, contre 1,13 milliard de dollars en 2013, en hausse de 69,4%. Les quantités importées en 2014 ont atteint 395 989 tonnes, contre 276 928 tonnes en 2013, soit une augmentation de 43%. Une bonne partie de cette poudre de lait est cédée au prix subventionné aux centaines d'unités de fabrication de fromage, de yaourt et autres crèmes fraîches destinées à la pâtisserie. Selon les statistiques du ministère de l'Agriculture et du Développement rural, l'Algérie consomme annuellement 5 milliards de litres de lait, mais elle n'en produit que 3,5 milliards. À ce rythme, l'Algérie continuera à importer de grosses quantités de poudre de lait. S. S.