L'Autorité de régulation de l'audiovisuel a jugé bon de verbaliser KBC TV sur deux émissions au contenu politique, mais s'est gardée d'émettre le moindre avertissement lorsque, jusqu'à récemment, l'apologie du terrorisme se normalisait sur d'autres plateaux TV. Il aura fallu le rappel à l'ordre du ministère de la Communication. Le président de l'Autorité de régulation de l'audiovisuel (Arav), Miloud Chorfi, a jugé nécessaire de verbaliser KBC TV, en convoquant dimanche son directeur Ali Djeri, dans son bureau. Les deux émissions au contenu politique sont remises en cause sous prétexte d'atteinte à la dignité de personnes que l'Arav présente comme étant "des symboles de l'Etat et hauts fonctionnaires des institutions de la République". "Allô oui" et "Djournan El-Gosto" sont, en effet, deux programmes à caractère satirique. Pas plus que l'émission "El-Djazaïria Week-end", dont le directeur s'est vu contraint de s'autocensurer, fin avril 2015, sous la pression de la même Autorité de régulation de l'audiovisuel. Ainsi, les deux sorties de l'ancien chef du groupe parlementaire du RND, depuis son installation en septembre 2014, à la tête de l'Arav, sont à inscrire dans le chapitre des programmes "politiquement incorrects". Miloud Chorfi, il faut le préciser, est particulièrement vigilant lorsqu'il s'agit de critiques ou des scènes TV tournant en dérision des personnes au pouvoir. Ce qui semble loin d'être le cas, s'agissant de la République elle-même menacée dans son fondement par des programmes faisant l'apologie du terrorisme et diffusés jusqu'à récemment sur d'autres chaînes. Il aura fallu, rappelons-le, l'intervention du ministère de la Communication pour que les appels à la création d'une ambassade de Daech en Algérie et autres caméras cachées made in EI, disparaissent des écrans des Algériens. Le rappel à l'ordre du ministère de la Communication peut, certes, être considéré plus fort, puisque c'est ce même département qui a délivré des autorisations temporaires à ces chaînes audiovisuelles de droit étranger. C'est donc lui-même qui peut les retirer et il a menacé de le faire pour les celles qui n'abdiqueraient pas. Il reste que le ministère de la Communication peut ou ne pas le faire lorsqu'il s'agit du contenu d'un programme TV. Mais pour l'Arav il s'agit plutôt de sa raison d'être. À savoir, veiller aux programmes qui peuvent véhiculer des messages de haine, appels au meurtre, violences et apologie du terrorisme... Reste que l'absence d'un cahier des charges pouvant définir la réglementation algérienne en matière de diffusion audiovisuelle laisse problématique toute intervention pour juger de tel ou tel autre dérapage. Mais puisque l'Arav ne s'encombre pas de ce genre de scrupules lorsqu'il s'agit de verbaliser KBC TV, pourquoi ne pas le faire lorsqu'il s'agit des autres chaînes TV, dont le contenu peut s'avérer beaucoup plus dangereux ? Une manière de faire les choses qui s'apparente plus à des pratiques informelles. Pour preuve, Miloud Chorfi a été installé à la tête l'Autorité de régulation de l'audiovisuel, mais l'Arav n'a pas encore été officiellement installée. Une situation, somme toute, inédite ! M. M.