Le parti d'Ali Benflis doute encore une fois du rédacteur de la lettre du président de la République, alors que le RCD estime que "le message des scribouillards d'El-Mouradia adressé au nom de Bouteflika n'est qu'hérésie et mensonge". Le changement de ton dans le message présidentiel à l'occasion du 53e anniversaire de l'Indépendance nationale fait encore une fois douter l'opposition sur le véritable rédacteur de la lettre. Le porte-parole des Avant-gardes des Libertés, Ahmed Adimi, fait d'abord remarquer que "c'est le même Président qui adressait le 19 mars dernier un message à l'opposition pour la menacer, la dénigrer et l'accuser de faire dans la politique de la terre brûlée". Ce qui l'amènera à déduire : "Nous ne savons pas qui parle encore cette fois-ci, au nom du Président, car, à chaque fois, une lettre vient contredire la précédente." S'agissant du contenu du message, Ahmed Adimi dément toute avancée en matière de libertés collectives et individuelles. "J'aimerais évoquer la presse écrite exposée constamment aux pressions de la publicité Anep, le journaliste de Tébessa, Abdelsami Abdelhaï, qui croupit en prison depuis presque deux ans, et les chaînes de télévision privées qui restent otages d'une réglementation qui ne leur confère pas la possibilité d'être de droit algérien", rappelle-t-il. Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) va encore plus loin et souligne qu'"on ne peut pas cacher sa faillite et son impotence à assumer ses fonctions par le simple exercice épistolaire". Son secrétaire national, chargé de la communication, Athmane Mazouz, estime même que "le message des scribouillards d'El-Mouradia adressé au nom de Bouteflika n'est qu'hérésie et mensonge". Et tout en qualifiant de "vilaines allusions" les propos consacrés à l'opposition dans la lettre du Président, le RCD s'interroge : "Qui peut encore croire en un chef d'Etat qui passe de la menace à l'encensement dans deux discours qui lui sont attribués en l'espace de quelques mois ? Ceci relève du délire, le croire est forfaiture." Au même titre que le parti d'Ali Benflis, celui de Mohcine Belabbas ne constate pas une avancée dans le domaine des droits de l'Homme durant le règne d'Abdelaziz Bouteflika. "Il déclare vouloir nourrir notre pluralisme politique, associatif et syndical, de joutes nobles alors que sur le terrain les Algériens sont confrontés chaque jour au tout contraire. Pluralisme politique de façade et opposition attaquée et réprimée ; mouvement associatif et syndicats autonomes et pluriels interdits d'action pour laisser place aux organisations croupions et servilités de sérail sans crédibilité ni représentativité." Le Mouvement pour la société et la paix (MSP), qui a aussi souligné un changement de ton par rapport au dernier message du Président, s'interroge à son tour "s'il s'agit maintenant d'un changement de politique ou seulement de discours à l'égard de l'opposition". Son chargé de la communication, Zineddine Tebbal, fait rappeler qu'il y a eu bien des discours qui ne se sont jamais traduits en faits palpables. "Nous citons le recul des libertés. Les conférences et les meetings de l'opposition sont toujours empêchés alors que l'administration refuse de délivrer des autorisations pour de simples activités partisanes. Ceci, sans parler des autres moyens d'expression, à l'exemple des marches et des rassemblements", regrette-t-il, tout en précisant que "même s'il y a quelqu'un d'autre qui parle au nom du Président, cela engage pleinement la personne d'Abdelaziz Bouteflika et qu'il doit, par conséquent, assumer". Le président de l'Union des forces démocratiques et sociales (UFDS), Noureddine Bahbouh, n'en pense pas moins. Il ne comprend pas comment une opposition qui était accusée de tous les maux le 19 mars dernier, devient le lendemain fréquentable. "C'est une autre contradiction du pouvoir. Nous doutons du rédacteur de cette lettre", indique-t-il. Noureddine Bahbouh dit aussi avoir été surpris par le contenu de la lettre, surtout s'agissant des supposées avancées en matière de liberté. "Pour le pouvoir, la liberté se résume peut-être à ne pas mettre des journalistes et des hommes politiques en prison. Alors que la liberté est aussi celle d'une presse non muselée par la publicité étatique, le droit aux rassemblements et aux manifestations...", conclut-il. M. M.