Parce que intervenant dans un contexte particulier marqué par des changements dans le corps sensible des services, la visite de Lamamra en France suscite forcément des interrogations. C'est la seconde visite en l'espace d'un mois. Le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra, est depuis, hier, en France, pour une visite de trois jours à l'invitation de son homologue français, Laurent Fabius. Officiellement, il s'agit d'une visite qui s'inscrit, selon le jargon diplomatique consacré, dans le cadre des consultations régulières entre les deux pays autour des questions d'intérêts communs. Hier, pour leur première rencontre, Laurent Fabius et Ramtane Lamamra ont passé en "revue des échéances en matière de coopération algéro-française, y compris la réunion du Comefa (Comité mixte économique algéro-français) en octobre prochain", selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères. Il s'agit donc de préparer la réunion de ce comité prévu en octobre à Paris et du comité intergouvernemental de haut niveau prévu au début de l'année prochaine. Lors de sa visite en mai dernier en Algérie, durant laquelle il avait coprésidé une réunion de suivi du Comefa consacrée aux secteurs du transport, du logement et de l'habitat et de l'agroalimentaire, Laurent Fabius avait exprimé le souhait de Paris d'approfondir le partenariat avec Alger dans tous les domaines et de travailler à d'autres projets communs dans l'industrie, les énergies renouvelables, ou encore le tourisme. "Les crises régionales et internationales, ainsi que les situations prévalant en Afrique et au Moyen-Orient ont également fait l'objet d'échanges de vue à la lumière des activités et efforts prévus à l'occasion du 70e anniversaire des Nations unies", ajoute le MAE. En d'autres termes, la situation au Mali où l'accord d'Alger est mis à mal et la situation en Libye qui inquiète de plus en plus les deux pays, en dépit de quelques avancées réalisées par la médiation onusienne conduite par Bernardino Leon, ont été au cœur des discussions entre les deux parties. Mais ce que n'évoque pas le communiqué et qui visiblement va se tailler la part du lion, ce sont les restructurations qui ont touché les services secrets algériens, ces dernières semaines, et qui, selon toute vraisemblance, inquiète au plus haut point Paris. C'est, du moins, ce qu'affirme le site Mondafrique. Selon ce journal dirigé par le journaliste enquêteur, Nicolas Beau, le sort du DRS est au menu de ce voyage parisien de Lamamra. "L'emprisonnement du général Hassan, l'ex-patron de la lutte anti-terroriste au sein des services secrets en Algérie (le DRS), qui travaillait régulièrement sur ces dossiers avec les Français, a semé la panique dans les rangs de plusieurs réseaux français en Algérie. Plusieurs lobbies étaient très proches de ce haut gradé du DRS, qui était présenté comme le successeur du général Toufik, le numéro un du DRS depuis le début des années 1990. Le général Hassan, depuis 2007/2008, s'occupait d'une cellule de coordination opérationnelle qui surveillait et contrôlait tous les autres services du DRS. Il avait à son service plus de 2 000 hommes. Les agents les plus performants du DRS algérien. Cette force lui avait procuré une forte influence au sommet du régime algérien", écrit ce site. Mais, ce sont probablement les conséquences des changements opérés sur la coopération sécuritaire entre les deux pays et sur la question de la succession à Bouteflika qui doivent constituer une source d'inquiétude pour les Français. Mais au-delà, il n'est pas exclu que Paris, à travers la visite de Lamamra, mais aussi d'autres responsables français qui vont venir prochainement en Algérie, cherche à envoyer un signal positif à Alger à la veille d'une visite de Hollande... au Maroc. K. K.