Ayant amorcé le dégel en février dernier en recevant le souverain alaouite à l'Elysée, le président français a pour mission de mettre fin définitivement à la brouille entre les deux pays, née de la polémique autour du patron du contre-espionnage marocain, visé par des plaintes en France pour torture. En effet, après un froid dans les relations entre Rabat et Paris, suite à une série de différends diplomatiques, François Hollande, qui s'était chargé de calmer les esprits en recevant Mohammed VI à l'Elysée en février dernier, après la signature d'un nouvel accord judiciaire avec le Maroc, est en visite dans ce pays dans l'espoir de voir cet épisode faire partie du passé. Et c'est à la tête d'une importante délégation que le locataire de l'Elysée a entamé, hier, une délicate visite de deux jours à Tanger sur fond de polémique autour du patron du contre-espionnage marocain, visé par des plaintes en France pour torture. Alors que ce déplacement a été qualifié par Paris de "visite de travail et d'amitié", des associations de défense des droits de l'homme se sont inquiétées, jeudi, qu'il puisse être l'occasion de décorer de la Légion d'honneur le chef de la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST), Abdellatif Hammouchi. L'entourage du président français a formellement démenti cette remise de décoration lors de la visite, mais pas son principe. Pourtant, le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, avait annoncé en février que Paris décorerait prochainement des insignes d'officier de la Légion d'honneur Abdellatif Hammouchi, pour son rôle dans la lutte contre le terrorisme. À Paris, on considère que "la page est tournée" sur cette affaire, et on assure que "depuis plusieurs mois, on n'est plus dans la réconciliation, on est plutôt dans la reprise d'une relation très dense". Il n'en demeure pas moins que les critiques ne s'arrêtent pas là, et à la veille de la visite de Hollande, l'association Reporters sans frontières (RSF) n'a pas caché son inquiétude sur la situation de la liberté d'information dans le royaume, "où la critique de sujets tabous tels que la monarchie ou l'intégrité territoriale peut amener à de lourdes condamnations". De son côté, le Parti communiste français a fustigé une visite "malvenue" dans un pays où "la répression policière et les emprisonnements s'abattent sur les démocrates et les syndicalistes". En dépit de ces critiques, Hollande envisage de renforcer les liens économiques entre les deux pays, pour espérer ravir à l'Espagne la place de premier partenaire commercial du Maroc, même si Paris reste le premier partenaire économique de Rabat grâce à l'importance de ses investissements, "une douzaine de milliards d'euros en stock". La lutte contre le terrorisme sera aussi au programme de cette visite, alors que le gouvernement marocain a récemment durci les lois contre toute personne impliquée dans des activités liées à des groupes terroristes. M.T.