La réticence à souscrire à l'effort d'austérité est aggravée par ce que le traitement de certaines affaires de corruption a donné à découvrir comme fortunes indûment amassées, y compris par d'anciens ministres. La crise financière étant là, sérieusement pesante, le gouvernement n'a d'autre choix que de se rendre à une politique d'austérité, synonyme de réduction des dépenses publiques. L'amenuisement des recettes de la fiscalité pétrolières imposera nécessairement l'élargissement de l'assiette fiscale par l'exploitatation de nouvelles niches qui contribueront au financement du budget de l'Etat. D'ailleurs, l'affirmer relève de la vérité axiomatique qui n'a pas besoin d'être confortée par des avis d'experts. Mais, si Abdelmalek Sellal s'est obligé à solliciter l'entremise du Cnes pour la réunion de tout un panel pour le certifier encore, c'est qu'il a éprouvé l'impérieuse nécessité de dire l'austérité par d'autres et encore mieux par ceux dont les voix font autorité et, donc, plus éligibles à être écoutées. Car la plus grande préoccupation de l'Exécutif en ce moment est de trouver le moyen d'exécuter son plan d'austérité sans trop avoir à subir les effets de son contrecoup social. Une entreprise délicate, voire pas du tout évidente pour un gouvernement qui aura à prendre des mesures forcément impopulaires, alors qu'il a la responsabilité entièrement engagée dans la crise mais encore souffre d'un déficit de légitimité. La "rationalisation", si l'on doit rester fidèle au vocable par lequel la politique d'austérité est désignée officiellement, ne sera pas une sinécure pour l'Exécutif qui, pour parvenir à mettre en application sa nouvelle feuille de route économique sans coup férir, a besoin de l'adhésion du peuple. Ce qui est loin d'être acquis. Le sentiment le plus partagé, sur les réseaux sociaux notamment, est à la réticence. Sans surprise, au demeurant, puisque la note présentée aujourd'hui au peuple est, certes, causée par la chute drastique du prix du baril du pétrole sur les marchés internationaux, mais c'est l'imprévoyance, l'imprudence et le manque d'anticipation du gouvernement qui ont fait qu'elle soit si lourde de conséquences pour la vie économique nationale et, donc, sur les ménages. La réticence à souscrire à l'effort d'austérité est aggravée par ce que le traitement de certaines affaires de corruption a donné à découvrir comme fortunes indûment amassées, y compris par d'anciens ministres. Le commun des citoyens estime que c'est à ceux qui ont organisé la rapine qu'il faudra présenter la facture et non à lui. Cela étant, pour qu'une politique d'austérité ait des chances de réussir sans soubresauts sociaux, et cela est établi depuis toujours, il faut que la confiance règne entre les gouvernants et les gouvernés. Or, dans la situation qui nous intéresse, c'est ce contrat de confiance qui manque le plus, voire totalement inexistant même. Et c'est de là que lui viendrait la difficulté à gouverner en temps de crise. Le gouvernement, auquel l'opulence financière inespérée des quinze dernières années a permis de s'assurer une paix sociale, à travers des résolutions très populistes, certaines contestables en ce qu'elles étaient essentiellement dictées par des considérations électoralistes, n'a pas jugé judicieux de faire participer le peuple, à travers ses représentations, à l'élaboration de ses politiques économiques et sociales. Il s'est, en effet, rarement plié à l'obligation constitutionnelle qui lui est faite de présenter sa feuille de route devant le Parlement. Il s'est aussi souvent dérobé à l'obligation de soumettre son action à évaluation. Autant de facteurs handicapants pour l'action du gouvernement, surtout s'il prétend gérer la crise avec sa composante actuelle. S. A. I.