Le propos n'est pas d'un homme politique quelconque, mais d'un ancien ministre qui a fréquenté les gouvernements Bouteflika pendant trois mandats. Daho Ould Kablia pense qu'"il n'est pas dans la culture" de l'actuel Président d'instaurer une réelle démocratie. La terminologie la plus appropriée que l'ancien ministre de l'Intérieur prête aux changements opérés au sommet de l'Etat est le mot "flou". Dans un entretien publié mercredi par le journal électronique TSA, Daho Ould Kablia a estimé que "le président Bouteflika n'a jamais été très transparent dans ce qu'il envisage de faire ou de défaire". La rumeur, selon lui, "y ajoute plusieurs couches qui confortent cette opacité et empêche toute interprétation politique sérieuse". Il cite d'ailleurs comme exemple la question de la révision constitutionnelle pour laquelle "il (Bouteflika) se réserve le calendrier de sa mise en œuvre". En parlant de transparence, Daho Ould Kablia considère qu'"il aurait été logique et naturel qu'elle (la Constitution) soit rendue publique et que tout le monde puisse donner son avis dans la cadre d'un grand débat d'idées. C'est cela la démocratie, à mon avis. Mais s'il s'agit d'un projet secret qui sera soumis au dernier moment à un Parlement élargi qui l'examine sans en débattre et l'adopte, sans aucun doute à la majorité requise, ce sera un raté dans le processus de construction de la démocratie". Sur la question de savoir si les derniers évènements, notamment la mise à la retraite du désormais ex-patron du DRS, le général de corps d'armée Mohamed Mediène, dit Toufik, augurent de la volonté de Bouteflika à construire une réelle démocratie, l'ancien membre influent au Malg ose le propos : "Ce n'est pas dans sa culture, mais peut-être y songe-t-il pour ses successeurs." Daho Ould Kablia s'explique davantage : "Je dois quand même vous dire que la démocratie, au sens strict du terme, n'est pas la panacée pour la résolution des nombreux problèmes du pays. Elle peut être source de progrès comme elle peut être source de désordre si le peuple n'acquiert pas la maturité politique qui lui ferait accepter l'autre quand il est différent. La démocratie ne peut pas non plus se construire s'il n'y a pas un Etat fort et crédible, des lois et des règlements rigoureux applicables à tous. Le citoyen ne respectera la loi que s'il voit que les puissants se plient à sa volonté. Mais pour le moment, les problèmes sont tellement complexes et divers, instabilité et insécurité aux frontières, crise économique et son impact sur le pouvoir d'achat, crise de gouvernance et absence de dialogue avec l'opposition que l'on perçoit difficilement le cap tracé par le président de la République." S'agissant des rumeurs faisant état d'interférences dans la prise de décision dans la gestion des affaires de l'Etat, l'ancien ministre de l'Intérieur préfère dire qu'"officiellement et légalement, Bouteflika est le président de la République, élu par le peuple. Il a un handicap, c'est sûr, mais les grandes décisions qui ont été prises dernièrement ne peuvent que porter sa signature. Il ne s'occupe certainement pas des questions de détail, mais même malade, il est suffisamment conscient de son statut pour ne pas se laisser dicter ses choix". Le seul problème, poursuit Daho Ould Kablia, est que le Président "délivre ses choix à dose homéopathique en s'appuyant sur la conjoncture". Ce qui, à ses yeux, "n'est pas rassurant pour le peuple qui veut savoir clairement où va son pays". M. M.