Selon les psychologues de l'Association pour l'aide psychologique, la recherche et la formation (Sarp), les années du terrorisme n'ont pas livré toutes leurs séquelles et autres traumatismes. “On n'en a pas encore fini avec la prise en charge psychologique des victimes du terrorisme”, révèle le bilan des activités de la Sarp. Activant depuis des années dans la commune de Sidi Moussa, dans le cadre de la prise en charge psychologique, l'association a conclu au fait que les années passées n'ont pas aidé certaines victimes à tourner la page de la terreur. “Nous sommes persuadés que nous n'avons pas encore fini avec le suivi des victimes du terrorisme”, martèle Mme Bouatta. La présidente de l'association étaye ses dires en rapportant un cas révélateur. Il s'agit d'une mère de famille qui s'est présentée en 2004 chez la psy, dans tous ses états, en soutenant qu'il y a un mois, elle a perdu son fils suite à l'explosion d'une bombe dans son école. Le récit de la dame était tellement précis que les psychologues ont cru que l'acte décrit a réellement eu lieu, il y a tout juste un mois. Or, il s'est avéré que l'explosion a bel et bien eu lieu, mais il y a sept longues années. Il a fallu à cette dame autant d'années avant de pouvoir s'extérioriser et se débarrasser de tous ses traumatismes. Rien ne dit que d'autres victimes ne sont pas appelées à vivre des scènes de rappel semblables à celle de cette mère de famille. Abordant le thème central de la rencontre, à savoir l'enfance en souffrance et maltraitée, Mme Bouatta a évalué l'action de son association en direction de cette frange vulnérable. Les spécialistes de la Sarp ont eu à traiter, durant ces quatre dernières années (2000- 2004), 144 enfants traumatisés : 79 garçons et 65 filles. Les séances hebdomadaires de trois quarts d'heure pourraient se poursuivre pendant une année voire deux. “La prise en charge dure encore plus quand il s'agit de cas lourds et difficiles”, précise Mme Boukhaf. Et de faire remarquer que les troubles sont ressentis chez les petits garçons plus que les petites filles. “ Alors qu'à l'âge adulte, c'est l'inverse”. S'agissant des motifs de la consultation, le bilan de la Sarp cite en premier lieu l'échec scolaire (54%), ensuite la peur et l'angoisse (20%). Généralement, ce sont les mères qui accompagnent les enfants chez les psy de l'association. Ces derniers ont fini par découvrir que ce motif n'est qu'un prétexte pour justifier le recours à la prise en charge. Rassemblés au départ pour adopter une action commune à même d'aider les enfants, les mamans semblent, elles-mêmes avoir besoin de suivi avant leur progéniture. “Elles en ont tellement besoin qu'au début des thérapies de groupe, elles ont oublié les enfants et discutaient de leurs propres souffrances. Cette espace d'expression leur a permis de s'extérioriser et de mieux nous aider à prendre en charge leurs enfants”, estime l'interlocutrice. Et de relever que les enfants, dont les mamans se sont beaucoup investies, se sont vite améliorés. M. B.