Le président du Rwanda Paul Kagamé a fait adopter son projet de changement de Constitution, par le Parlement et le Sénat, sans la moindre difficulté, ce qui va lui permettre de se représenter pour un troisième mandat en 2017. Le texte avait été adopté par le Parlement fin octobre et par le Sénat durant la journée d'hier. Le Sénat a voté, dans les mêmes termes que la Chambre basse le 29 octobre, les nouveaux articles 101 et 172 qui sont donc définitivement adoptés, ainsi que les 175 autres articles de la future Constitution, dont une soixantaine ont été amendés par rapport à la version adoptée par la Chambre des députés. Le nouvel article 101 fait passer de sept à cinq ans le mandat présidentiel et en limite le nombre à deux. Mais le nouvel article 172 précise que cette réforme n'entrera en vigueur qu'à l'issue d'un nouveau septennat transitoire entre 2017 et 2024, pour lequel le président actuellement "en exercice" reste éligible, de même qu'ensuite pour les deux quinquennats prévus dans le nouvel article 101. Cette réforme constitutionnelle est présentée par le pouvoir comme le fruit d'une initiative populaire, mais de nombreux observateurs doutent de sa spontanéité et y voient une manœuvre orchestrée par les autorités, dans un pays régulièrement épinglé pour ses atteintes à la liberté d'expression et son peu d'ouverture politique. Quelque 3,7 millions de Rwandais ont signé des pétitions lancées à travers le pays pour demander un maintien au pouvoir de M. Kagame, 58 ans. Seule formation politique du pays à s'opposer à cette réforme constitutionnelle, le petit Parti démocratique vert a demandé à la Cour suprême d'interrompre le processus, mais sa requête a été rejetée début octobre, les magistrats estimant qu'"aucun article (de la Constitution) n'était immuable". Vice-président et ministre de la Défense entre 1994 et 2003, Paul Kagame a été élu chef de l'Etat cette année-là avec 95% des voix et réélu tout aussi triomphalement (93%) en 2010. Il est de fait l'homme fort du pays depuis que la rébellion du FPR (Front patriotique rwandais) qu'il dirigeait, a chassé, en juillet 1994, le régime extrémiste hutu et mis fin au génocide déclenché en avril précédent, qui a fait environ 800 000 morts essentiellement au sein de la minorité tutsie. R. I./Agences