Cette batterie de mesures "salvatrices" pour l'économie algérienne, selon M. Haddad, est pourtant décriée par des experts économiques, à l'instar d'Akli Moussouni, économiste et expert en développement, qui, décortiquant ce "plan de sauvetage", l'a d'emblée qualifié de "marché de dupes" et de "vaste supercherie" en raison des mesures "irréalistes" et "superficielles" qu'il propose. Le Forum des chefs d'entreprise (FCE) a, récemment, soumis au gouvernement une série de mesures censées "contribuer à l'émergence de l'économie algérienne". Le président du FCE, Ali Haddad, avait expliqué que ces propositions, "fruit d'une concertation maturée" entre les différents acteurs économiques du pays, devraient permettre d'atteindre un taux de croissance de 8%, créer 60 000 entreprises par an, "relancer" les secteurs du BTP, l'agriculture et les services, la création de 2 millions d'emplois, la réduction de la facture d'importation de 15 milliards de dollars, assurer la sécurité alimentaire par la concession aux producteurs privés de 10 000 à 100 000 hectares de surfaces agricoles... à l'horizon 2020. Cette batterie de mesures "salvatrices" pour l'économie algérienne, selon M. Haddad est pourtant décriée par des experts économiques, à l'instar de M. Akli Moussouni, économiste et expert en développement, qui décortiquant ce "plan de sauvetage", l'a d'emblée qualifié de "marché de dupes" et de "vaste supercherie" en raison des mesures "irréalistes" et "superficielles" qu'il propose. Concernant le taux de croissance "préconisé" à 8%, sachant que les pays développés peinent à atteindre 1%, cet expert estimera qu'il est "farfelu" parce que, selon lui, "aucun programme de diversification de l'économie n'est engagé à ce jour ! (...) on ne fait que prendre des mesures de réduction de la facture d'importation, du soutien de l'Etat et de fiscalité nouvelle, en vue de gonfler la trésorerie", d'une part. En outre, avec la crise économique, le pays a perdu 50% de ses recettes pétrolières. S'agissant des prévisions de création de 60 000 entreprises par an, M. Moussouni estimera que la proposition "ne fera que compliquer la situation", parce que la situation de l'économie algérienne est due essentiellement à 3 facteurs : le morcellement du potentiel économique, l'absence totale d'organisation autour des produits et l'intervention de l'Etat, à travers des agrégats dispersés. Selon lui, la priorité est de "remédier à ces tares avant de penser à créer de nouvelles entreprises". Au sujet de "la relance" de l'agriculture, des services et du BTP, il indiquera que cette mesure est "illusoire", précisant qu'il faudrait "neutraliser les politiques qui ont conduit à la dilapidation du potentiel humain, des savoir-faire collectifs, des vocations des territoires, des mécanismes de soutien de l'Etat à l'emploi, érigés en assistanat". "Même le coiffeur du coin est soutenu par l'Etat à travers le pré-emploi pérennisé", ironise l'économiste. Interrogé sur la mesure liée à la coordination entre le FCE et l'Ansej, il répondra que "le FCE en tant que tel ne peut intervenir nulle part" avant de se demander : "Les mécanismes de l'Ansej et de la Cnac, dont les montants accordés ne peuvent servir qu'à acquérir des outils de service, quelle relation auront-ils avec le FCE, qui veut s'inscrire dans la logique de développement des richesses ? Rien", selon lui. Sur la mesure de dépénalisation de l'acte de gestion, notre interlocuteur considère que "c'est l'inaction qui pose problème", et d'expliquer : "On en a vu des responsables qui n'ont pas fait bouger d'un iota le contexte pour lequel ils étaient désignés, durant leur mandat (...) avec 800 milliards de dollars, perdus et non fructifiés, il n'y a pas de raison de faire davantages d'erreurs." Sur la prévision de réduction de la facture d'importation de 15 milliards de dollars, d'ici à 2020, l'expert est catégorique : "Le FCE ne fait part d'aucune stratégie claire et précise à mettre en œuvre dans son document. C'est uniquement de la phraséologie", tout en reconnaissant que "les propositions du FCE sont, certes, positives, mais insuffisantes pour servir de plateforme de travail pour redémarrer les secteurs de l'industrie". Enfin et s'agissant des mesures pour booster les exportations hors hydrocarbures, il indiquera que"ce n'est pas pour l'immédiat. Car, selon lui, nos producteurs ne sont pas préparés et que l'Algérie ne s'est pas construit un marché national normalisé." Un handicap qui l'empêche d'adhérer dans l'immédiat à l'OMC, de profiter des accords d'association avec l'UE et la Zone arabe de libre-échange (Zale). R.B.