“Mon mandat n'expirera pas avant 2006. D'ici là, il n'y aura pas de changement ni à Alger ni ailleurs”, a averti l'Egyptien, Amr Moussa, durant son séjour à Alger. Le “j'y suis, j'y reste” du secrétaire général de la Ligue arabe avait pour cadre la résidence de Djenane El-Mitaq où il a animé une conférence de presse, hier, en compagnie du ministre algérien des Affaires étrangères, Abdelaziz Belkhadem. Excédé par la question ressassée des journalistes quant à l'instauration d'une présidence tournante au sein de l'organisation régionale telle que souhaitée par l'Algérie, l'hôte de Belkhadem n'a eu aucun mal à désavouer celui-ci, en y trouvant toutes fois les formes. Selon lui, les accusations de notre chef de la diplomatie quant à l'emprise de l'Egypte sur la Ligue arabe relèvent d'une mauvaise interprétation des médias. “Il n'y a aucun différend entre nous”, a asséné en guise de mise au point l'ex-ministre des Affaires étrangères de Hosni Moubarak. Arguant “des assurances qu'il a obtenues des plus hautes autorités algériennes”, notamment du président Bouteflika qui l'a reçu à déjeuner, il considère “comme close” la polémique suscitée, ces derniers temps, autour du projet algérien pour la réforme de la ligue, dont la mise en place d'une présidence tournante. En tout cas, Le Caire a bel et bien gagné sa bataille puisque ce point ne figurera pas à l'ordre du jour du sommet des chefs d'Etat prévu du 20 au 23 mars prochain. La confirmation sort de la bouche même de Abdelaziz Belkhadem. “Cette question ne sera pas posée lors du prochain sommet”, a-t-il annoncé. Face à la menace égyptienne de boycotter la rencontre et d'entraîner dans son sillage une partie des autres Etats arabes, dont son allié, l'Arabie Saoudite, Alger a cédé. Du moins, elle a reporté à plus tard sa volonté d'arracher la ligue à la mainmise du Caire. Depuis l'existence de cette organisation, il y a soixante ans, la présidence a toujours échu à un Egyptien. Une unique parenthèse a été ouverte après la signature par Anouar Sadate des accords de Camp David et le transfert de la chefferie à la Tunisie. Mais dès le retour du pays des Pyramides dans le giron de la nation arabe au début des années 80, ses dirigeants se sont empressés de se réapproprier la ligue. Ce qui est naturellement exaspérant pour Alger qui a assimilé l'organisation à une “succursale du ministère des AE égyptien”. C'est l'aveu même de Belkhadem. Hier, notre chef de la diplomatie, tout en assurant de l'attachement du gouvernement algérien à l'instauration d'une présidence tournante, a atténué sa détermination en renvoyant cette exigence aux calendes grecques. Selon lui, une telle alternative pourrait prendre forme sous l'aspect d'une troïka. Par ailleurs, Belkhadem a fait mine de ne pas comprendre pourquoi l'attention des médias est focalisée autour de la question de la présidence tournante, alors que le projet de réforme algérien comporte d'autres points tels que la mise en place d'un conseil de paix et de sécurité, une cour de justice et la révision des procédures de vote. Sans doute moins important que l'enjeu de la présidence, le suffrage, selon la version algérienne, a provoqué une autre polémique. Opposé au vote par consensus, Alger a proposé des alternatives à l'instar de la majorité qualifiées et simples. Or, sachant que les Arabes se sont entendus pour ne pas s'entendre, la ligue sert à étouffer leurs divergences. Pourquoi changer alors ? S. L.