Réunis à Addis-Abeba à l'occasion du 26e sommet ordinaire de l'Union africaine (UA), les dirigeants africains ont apporté leur soutien à une initiative kényane visant à un retrait commun de la Cour pénale internationale (CPI) qui, à leurs yeux, "s'acharne" sur l'Afrique. Sitôt élu à la tête de l'instance continentale en remplacement du Zimbabwéen Robert Mugabe, le président tchadien Idriss Déby a déclaré : "Le constat que nous avons fait, (c'est que) la CPI s'acharne beaucoup plus sur l'Afrique, sur les chefs d'Etat africains, y compris des chefs d'Etat en exercice, alors qu'ailleurs dans le monde, beaucoup de choses se passent, beaucoup de violations des droits de l'homme flagrantes, mais personne n'est inquiété." "Il y a là deux poids, deux mesures", a-t-il estimé, avant d'ajouter : "C'est pour cela que nous avons décidé d'harmoniser notre position en attendant que la CPI prenne la mesure de l'importance de la position africaine sur cette question." Ceci étant, aucune décision légalement contraignante n'a été prise, et il appartient à chaque pays membre de l'Union africaine de décider individuellement de quitter ou non la CPI, la première Cour pénale internationale permanente, dont le fonctionnement est régi par son traité fondateur, le Statut de Rome, entré en vigueur le 1er juillet 2002. Pour rappel, le gouvernement kényan, depuis longtemps déjà très critique à l'égard de la CPI, l'accuse de cibler injustement les dirigeants africains. Nairobi a soumis une "proposition" (...) pour que l'UA développe une feuille de route pour le retrait des pays africains (de la CPI), qui a été adoptée au sommet de l'UA. Le Kenya est en pointe dans la critique de la CPI, qui a dû abandonner en décembre 2014, faute de preuves, des poursuites à l'encontre du président kényan Uhuru Kenyatta, pour son rôle dans les violences postélectorales de 2007-2008. Toutefois, le vice-président kényan William Ruto est toujours poursuivi par la CPI pour crimes contre l'humanité, meurtres, persécutions et déportations commis lors de ces mêmes violences, qui avaient fait plus de 1300 morts et 600 000 déplacés selon l'accusation. L'initiative kényane intervient alors que la CPI a ouvert la semaine passée le procès de l'ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, qui est devenu le premier ex-chef d'Etat poursuivi par la juridiction internationale depuis sa création. Créée en 2002 pour juger en dernier ressort les génocidaires et criminels de guerre qui n'ont jamais été poursuivis dans leur propre pays, la CPI a ouvert des enquêtes sur 8 pays au total, tous africains : Kenya, Côte d'Ivoire, Libye, Soudan, République démocratique du Congo, Centrafrique, Ouganda et Mali. M. T./Agences