Résumé : Houria voulait changer de look. Pour cela, elle se rendit dans un salon de coiffure et en sortira totalement métamorphosée. Mais pas à son avantage. Son employée la congédie, et Amar est horrifié par son aspect. Attirée par les cris, une voisine accourt aux nouvelles. Il allait refermer la porte lorsqu'elle le repousse pour s'introduire dans l'appartement. Elle demeure un instant interdite à la vue de Houria, puis éclate de rire. -Dans mon bled, il y a un adage qui dit qu'un crapaud qui voulait ressembler à un bœuf avait tellement enflé qu'il avait fini par exploser. Qu'est-ce que c'est que ce barbouillage sur ton visage Houria ? Tu es une belle femme, et tu n'as pas besoin de tous ces artifices. Et où sont donc passés tes beaux cheveux ? Amar repousse la voisine vers la porte : -Tu es venue demander du sel. Tiens, en voici tout un paquet. Bonne soirée. La voisine fait des yeux ronds : -J'ai cru que vous n'en aviez pas. -Finalement nous en avions. C'est tout ce que tu voulais, n'est-ce pas ? -Oui. Qu'arrive-t-il à ton épouse ? Amar ouvrit toute grande la porte d'entrée : -Bonne soirée chère voisine, et ne t'avise pas à revenir chez moi de sitôt. Il referme la porte derrière elle avec fracas, et revient vers Houria qui n'avait pas desserré les dents. -Voilà où nous en sommes arrivés par ton comportement. Elle lui lance un regard plein de haine : -Mon comportement ? Reproche-toi plus tôt le tien. -Je suis ton mari. Je ne veux pas te voir devenir la risée du quartier. Va vite te laver le visage et trouve le moyen de te débarrasser de cette affreuse couleur dans tes cheveux. Je ne le répéterai pas une troisième fois. Meriem, toute tremblante, tente de mettre sa petite menotte dans la main de son père. Il se rend compte alors de la présence de ses enfants autour d'eux. Ghania suçait son doigt, et Melaaz criait dans son berceau. -C'est ce que tu voulais ?, lance Houria en tendant son index vers les filles. Elle allait poursuivre, mais s'arrête net. Une autre gifle venait de l'atteindre et de l'envoyer à l'autre bout du salon. Le cri qu'elle voulait pousser est vite refoulé. Amar était revenu de la cuisine avec un couteau et menaçait de l'égorger. -Si jamais tu continues de n'en faire qu'à ta guise, je jure que je te tuerai et boirai ton sang jusqu'à la dernière goutte. Tu m'entends ! Elle met la main devant son visage pour se protéger et demeure prostrée sur elle-même. Amar prend les filles dans la cuisine. Il réchauffe le dîner, et sert Meriem, avant de préparer une soupe à base de farine de blé pour Ghania. On n'entendait plus les pleurs de Melaaz, qui devait dormir. Houria se relève enfin et se dirige vers la salle de bain. Elle en ressortira une heure plus tard, le visage lavé de tout artifice et sa tête cachée sous un foulard. Amar qui avait mis Meriem et Ghania au lit était resté au salon. Il fumait une cigarette et sirotait un café. Sa tête menaçait d'exploser. Il se lève et va chercher un comprimé d'asprine dans la salle de bain. Une surprise l'attendait : les cheveux décolorés de sa femme jonchaient le sol. Elle venait de se raser le crâne ! Le spectacle était tellement inattendu qu'il ne savait plus s'il allait en rire ou en pleurer. Pauvre de moi, se dit-il, je n'ai pas fini de découvrir cette sorcière qui est ma propre épouse. Depuis ce jour, Houria revint à de meilleurs sentiments envers son mari et la petite Meriem. Cette dernière, qui était une enfant très douée dans ses études et d'un tempérament très calme, tentait de retrouver un semblant d'équilibre entre son père et sa marâtre. Cependant, Amar n'était pas dupe. Il sentait que Houria n'allait pas s'arrêter en si bon chemin. Elle devait cacher d'autres desseins, et un jour d'autres surprises surgiront. En effet, Houria qui sortait quotidiennement avec la petite Melaaz se met à la recherche d'un nouveau job. Elle avait goûté à une liberté financière qu'elle ne connaissait pas, et ne pouvait plus se contenter des quelques pièces que Amar lui remettait pour faire les menues courses quotidiennes. Cette fois-ci, elle est embauchée dans un restaurant. Chaque après-midi, elle devait s'y rendre pour faire la vaisselle, laver le sol et dresser les tables dans les deux grandes salles à manger pour le dîner. Les horaires et les honoraires l'arrangeaient. Melaaz faisait sa sieste dans son landau, et elle était libre de disposer des heures qui lui restaient avant le prochain biberon. À la fin de la journée, elle repartait chez elle, parfois avec quelques restes du déjeuner, qu'elle emportait dans un panier, et aussi sa rémunération quotidienne. (À suivre) Y. H.