Résumé : Alors que les deux familles plaisantaient en prenant le café au salon, un cri leur parvint de la cuisine. C'était Meriem qui ressentait les premières contractions. Wassila attendra le retour de sa mère pour apprendre que sa sœur avait frôlé le pire avant de donner naissance à son enfant... Elle était son aînée de deux ans ! Comme mue par une force intérieure, Wassila regarde sa mère et demande : -Crois-tu que je pourrais avoir des enfants et les mettre au monde sans contrainte, maman ? Déjà ébranlée par sa fille aînée, Taos est surprise par la question de Wassila. Elle relève la tête et la regarde dans les yeux : -Ne trouves-tu pas que cette question est incongrue à cette heure-ci et au moment même où je reviens de la clinique, après avoir vécu de longues heures d'angoisse auprès de ta sœur ? -Oui, je sais... mais je voulais juste... -Tu voulais quoi ? l'interrompt sa mère... Tu voulais être rassurée et donner des enfants à Lyès afin qu'il ne te répudie pas ? -Non, ce n'est... -Si... si Wassila... Tu te demandes si des grossesses à ton âge sont sans danger. Elle lève les bras au ciel : -Voilà pourquoi que je voulais te voir mariée plus jeune... Plus on prend de l'âge, plus les grossesses deviennent compliquées... On a beau parler d'avancées médicales et technologiques, la nature demeure elle-même... Chaque chose en son temps. Elle se tait et regarde sa fille qui demeurait bouche bée, puis se ravise et reprend d'une voix plus calme : -Wassila, tu peux avoir un enfant ou deux et accoucher normalement si Dieu le permet... Pourquoi te tortures-tu déjà en pensant au pire ? La jeune femme baisse les yeux : -Je suis toute remuée par ce qui vient de se passer... Meriem a dû souffrir le martyre... Elle sentit les larmes couler sur ses joues : -Ma pauvre sœur voulait faire plaisir à sa belle-famille, qui l'exhortait sans cesse à faire un troisième enfant. On veut une famille nombreuse pour assurer la prospérité, sans penser à ce que cela engendre comme risques pour la mère et l'enfant. Taos se lève et la prend par les épaules : -Dieu a été clément cette fois-ci avec elle... Malgré ces longues heures de souffrances, Meriem s'en remettra... Elle regarde autour d'elle et demande : -Ton père a dîné ? -Nous étions trop angoissés pour penser à quoi que ce soit, d'autant plus que personne ne daignait nous renseigner ou répondre à nos appels. -Nous étions nous aussi trop préoccupés pour penser à autre chose. Elle baille et s'étire : -Je vais me mettre tout de suite au lit. Cette journée a été bien longue et bien pénible pour moi... Il y avait d'abord tes fiançailles, et ensuite cet accouchement. Wassila met la main sur l'épaule de sa mère : -Va te reposer maman, nous rediscuterons de tout ça demain. Taos se retire dans sa chambre, et Wassila demeure au salon. Elle jette un regard alentour, et remarque les tasses à café et les gâteaux qui traînaient encore sur la table basse. Le bouquet de fleurs que lui avait offert Lyès ainsi que quelques cadeaux trônaient sur la grande table... Depuis le départ de Meriem à la clinique, l'inquiétude l'avait gagnée. Si bien qu'elle n'avait rien pu faire... Feriel avait proposé de faire la vaisselle et de remettre de l'ordre dans le salon, mais comme Wassila estimait qu'elle avait déjà largement abusé de sa gentillesse, elle avait gentiment refusé son aide. La jeune fille était tout de même restée auprès d'elle après le départ de la belle-famille, et grâce à sa présence Wassila avait pu tenir le coup... Elle pousse un soupir de lassitude et se dirige vers la salle de bains. Dire que cela devait arriver justement le jour de ses fiançailles ! La glace lui renvoie une image débraillée. Ses cheveux décoiffés collaient à ses tempes et sur sa nuque. Son maquillage avait coulé et son visage ressemblait à un parchemin. Elle fait couler de l'eau dans la baignoire et s'y glisse. Seul un bain chaud lui permettra de se détendre et de bien dormir. (À suivre) Y. H.