Alger est la troisième ville la plus sale du monde, selon un classement établi par le groupe britannique Urbain Clean Environnent (2013). Le manque de civisme en est en grande partie la cause, mais ce n'est pas tout. À l'occasion de la visite à Alger du maire de Milan, Giuliano Pisapia, le wali d'Alger, Abdelkader Zoukh, a déclaré que "la wilaya d'Alger bénéficiera de l'expérience italienne en matière de traitement et de production d'énergie à partir des déchets", ajoutant que la ville d'Alger devrait bénéficier de ces nouveaux procédés pour régler définitivement le problème des déchets. Si on compte le nombre d'annonces d'assistance, d'études, de séminaires internationaux, de journées d'étude, d'enveloppes budgétaires qui ont vu le jour à ce sujet, il est légitime pour le citoyen, de la ville d'Alger en particulier, de s'interroger pourquoi toutes ces annonces, toutes ces opérations pilotes n'aboutissent pas à prendre à bras-le-corps la gestion des ordures ménagères. Alger est toujours l'une des villes les plus sales du monde, la troisième ville la plus sale selon un classement établi par le groupe britannique Urbain Clean Environnent (2013). Le manque de civisme en est en grande partie la cause, mais ce n'est pas tout. Contentons-nous de ne lister que quelques annonces enregistrées depuis 2010 et qui sont censées aboutir à un meilleur cadre de vie. Avant cela, il utile de rappeler le cadre qui a marqué les 2000. Durant cette période, plusieurs séminaires sous l'égide de la coopération allemande ont abouti à la confection du Programme national de gestion intégrée des déchets ménagers et assimilés (Progdem). Mais manifestement, les documents sont restés dans les tiroirs. Dans un entretien fleuve au magazine El Djazair (n°95, 2014), Mme Boudjemâa, qui était directrice générale de l'environnement durant les années 2000, avant de prendre les destinées du ministère, déclarait : "Ce programme est au cœur de la politique environnementale urbaine et constitue le prolongement de la loi 01-19 relative à la gestion, au contrôle et à l'élimination des déchets, dont le mérite est d'avoir clarifié les responsabilités des acteurs et défini les instruments de gestion. Il vise à éradiquer les pratiques de décharges sauvages et à organiser la collecte, le transport et le traitement des déchets dans des conditions garantissant l'innocuité de l'environnement et la préservation de l'hygiène du milieu. Depuis sa mise en œuvre, des résultats considérables ont été enregistrés à travers le Progdem qui a connu un état d'avancement important qui s'est traduit par l'élaboration d'études de schémas directeurs de gestion des déchets ménagers." Pourtant, lors d'une réunion présidée par le Premier ministre Abdelmalek Sellal, le 10 septembre 2014, et consacrée à la gestion de la ville d'Alger, la même ministre de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement n'avait pas exposé ce "plan qui a connu un avancement important" préférant annoncer un scoop : "En matière de gestion de déchets solides urbains, la wilaya d'Alger et le ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement travaillent ensemble sur un projet de transfert des ordures vers la décharge contrôlée de Hamici par voie ferroviaire en utilisant la ligne Birtouta-Zéralda, opérationnelle à partir de décembre 2015." Il est fort à parier que ce train – pour le transport des déchets urbains – ne sonnera pas. Une revue non exhaustive Revenant maintenant à ce qui s'est fait depuis là. En France d'abord. Le Conseil général des Bouches du Rhône et la wilaya d'Alger, liés par un accord d'amitié et de coopération depuis 2005, "ont concentré leurs efforts sur des axes forts, dont l'environnement, la thématique des déchets est l'une des priorités de ce volet environnemental. Un schéma directeur de gestion des ordures ménagères est en cours d'élaboration par la wilaya d'Alger. Dans ce cadre, le renforcement des compétences de l'établissement public NET COM, chargé de la collecte et du traitement des déchets ménagers d'Alger, est un chantier prioritaire dans la capitale algérienne" (décembre 2001). Plus que cela, la ville de Paris et la wilaya d'Alger sont liées par un accord d'amitié et de coopération signé le 14 janvier 2003. "Le volet propreté a été identifié comme un axe prioritaire. Améliorer, sur le terrain, la collecte, le tri et l'élimination des déchets ménagers par le biais de la formation des agents et de la sensibilisation des citoyens. Ce projet "propreté" a porté sur la création puis l'accompagnement de l'Ecole de la propreté, qui fait partie de l'Epic Net Com (wilaya d'Alger). Cet accompagnement porte sur deux volets principaux : appui à l'Ecole dans sa structuration et l'élaboration de son contenu pédagogique, d'une part, et à l'Epic Net Com dans la mise en place de dispositifs de communication et de sensibilisation citoyenne en matière de propreté et de gestion des déchets" (septembre 2012). En Belgique, ensuite. La coopération algéro-belge qui a impulsé plusieurs études dans le domaine des déchets ménagers en Algérie avec des échanges réguliers et soutenus travaille sur l'"appui à la gestion intégrée des déchets (AGID), retenue dans le PC 2014-2017 comme un des trois programmes, porte sur un appui à la gestion intégrée des déchets. Elle s'inscrit dans le Plan national pour l'énvironnement et le développement durable (PNAE-DD, 2014-2021) dont la version actualisée est en cours de validation". En Corée du Sud, deux conventions cadres ont été signées (2015). Il s'agit d'un mémorandum d'entente de coopération entre les deux ministères et la seconde signature porte sur l'accord de coopération entre l'Agence nationale des déchets (AND) et l'Institut coréen de l'industrie et technologique de l'environnement (KEITI) pour la mise en place d'un schéma directeur de gestion des déchets solides ménagers assimilés. Le financement, à charge des Coréens, s'élève à 700 000 dollars. Sur le site de l'AND aussi Une mission de formulation a eu lieu en septembre 2014 dans le cadre du prochain programme AGID (Appui à la gestion intégrée des déchets) dont la mise en œuvre devrait débuter dans la seconde moitié de 2015. Ce projet de coopération constitue une opportunité pour l'AND afin de renforcer ces compétences et sa notoriété dans le domaine de la gestion des déchets. Entretemps, un expert en environnement, financé par le Fonds d'étude et d'expertise, a pris ses fonctions en août 2014 au sein de l'AND. Pour rappel, la CTB (Coopération belge) a débloqué 11 millions d'euros pour le projet. Au mois de mai 2014, l'AND a accompagné la GIZ sur une étude sur la gestion des déchets dans le cadre du développement économique local sur le potentiel du recyclable dans les déchets ménagers. Aussi, la GIZ a appuyé l'AND à travers le financement d'une étude d'un plan de développement de l'institution. Auparavant, la wilaya d'Alger a sollicité Suez environnement, la multinationale française fortement présente au Maroc et au Moyen-Orient pour la gestion des déchets urbains de la ville d'Alger. Nous n'avons pas d'informations précises sur la suite de ces contacts. Les changements récurrents d'équipes au niveau des autorités chargées de l'environnement et même de la wilaya d'Alger n'aident pas aussi à situer les responsabilités. Au fait, après les voyages en France, en Belgique, en Corée du Sud, en Autriche, en Suisse nos experts de l'Agence nationale des déchets et du ministère des ressources en eau et de l'environnement vont se rendre prochainement à Milan pour s'enquérir directement sur place des expériences italiennes, cette fois-ci. C'est le sens de l'accord conclu lors de la rencontre qui s'est déroulée au siège du ministère, entre Abdelouahab Nouri, ministre des Ressources en eau et de l'Environnement, et Giuliano Pisapia, maire de Milan. R. S.