Trois ans après son limogeage par la direction de Sonatrach, sous l'ère d'Abdelhamid Zerguine, consécutivement au scandale de la Coupe d'Algérie, perdue face à l'USMA, marquée par le refus de la délégation mouloudéenne de monter à la tribune officielle pour recevoir les médailles de la main du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, le sulfureux Omar Ghrib est réhabilité par Amine Mazouzi, nouveau P-DG de Sonatrach. Depuis la levée de sa sanction par l'assemblée générale de la FAF, son retour aux affaires du Mouloudia d'Alger ne faisait, du reste, pas l'ombre d'un doute. Son come-back a été décidé, à vrai dire, au plus haut niveau, au sein même du cercle présidentiel, à un rang qui dépasse largement la direction de la société pétrolière et la Fédération de football, pour des raisons sans doute politiques difficilement explicables. Cependant, il est utile de rappeler qu'après son départ du MCA en mai 2013, Omar Ghrib avait intenté une action en justice contre le club pour non-payement de la somme de 7 milliards de centimes, qu'il a, selon lui, prêtée au club entre 2011 et 2013, du temps des vaches maigres et dont l'origine faisait, justement, l'objet d'un sérieux doute de Sonatrach. À coup, donc, de procédures judiciaires, Omar Ghrib a fini par avoir gain de cause et récupéré son pactole. Mais en fait pourquoi Sonatrach ne voulait pas payer Ghrib avant que la justice ne l'oblige à le faire alors qu'il s'agit là d'une dette reconnue ? En vérité, dans l'affaire qui opposait en justice Sonatrach à Omar Ghrib, l'ex-coordinateur du MCA était accusé tout simplement de blanchiment d'argent et d'avoir surtout fourni de fausses factures pour justifier des dépenses douteuses. Les soupçons ont d'ailleurs fait l'objet d'un rapport interne de la société Sonatrach sur les états financiers du MCA pour l'exercice 2012, dont Liberté détient une copie. Que dit ce rapport, pourtant accablant et qui cite nommément la personne de Omar Ghrib ? Primo, le document fait référence à des factures douteuses émanant par exemple d'un vendeur de pneus de l'ordre de 400 millions de centimes, de 250 millions d'un simple boucher, ou encore plus d'un milliard de dettes vis-à-vis des hôtels. En l'espace de trois ans de règne, note le document, la gestion de Ghrib a provoqué un déficit de plus de 30 milliards de centimes. Secundo, l'affaire des commissions prélevées sur les salaires des joueurs par Omar Ghrib. Des joueurs étaient en fait obligés de payer une "chipa" à l'ancien coordinateur de la section football sur leurs salaires pour pouvoir signer au MCA. Un ancien dirigeant du MCA, témoigne : "Une fois, j'ai reçu dans mon bureau un joueur qui était venu me voir pour me dire qu'on s'était trompé sur son salaire. Je pensais qu'il s'agissait d'une simple erreur de comptabilité, mais mon interlocuteur m'a vite corrigé en me disant qu'il a reçu un montant supérieur à son salaire habituel, alors que son contrat indiquait bel et bien ce salaire. Nous avons mené notre enquête et nous nous sommes aperçus que c'était le cas pour quasiment tout le monde. En fait, on a vite compris que l'ancienne direction procédait à des coupures arbitraires et qui allaient, bien sûr, dans les poches des anciens dirigeants". Pis, pour rassurer ses joueurs, Omar Ghrib distribuait des chèques en bois. Et quand les joueurs étaient payés, cela se faisait toujours en cash, ce qui est naturellement anti-réglementaire. Le document évoque aussi le détournement de l'argent d'un sponsor bien connu du MCA et un trafic de billetterie au stade de Bologhine avec des recettes qui ne correspondent pas à l'affluence des supporters du MCA. "Nous avons trouvé des recettes de 400 millions de centimes pour toute une année, alors que le MCA peut réaliser une telle recette en un seul ou deux matches, c'est curieux. Nous avons aussi trouvé beaucoup d'acquisitions de matériels sans aucune justification ou documents ce qui avait soulevé la curiosité de notre commissaire aux comptes", révèle cette ancien président du MCA, qui a été, depuis, dégommé du conseil d'administration du club car trop encombrant pour Sonatrach. "Sonatrach cherche à faire disparaître toute trace de ce rapport financier pourtant signé par un commissaire aux comptes et à écarter de l'entourage du club tout dirigeant au courant de ce document", explique notre interlocuteur. Sonatrach a donc décidé d'enterrer cette affaire et de faire confiance à nouveau à un personnage controversé, mais rien ne garantit que les pratiques problématiques ne vont pas se répéter ! SAMIR LAMARI