Même si de nombreux élus se réjouissent de la contrainte des délais imposés aux ministres dans le nouveau texte de loi, ils craignent que le bureau de l'Assemblée nationale ne tergiverse pour entraver l'initiative parlementaire. Le débat autour du projet de loi organique régissant les relations entre le Parlement et le gouvernement s'est essentiellement focalisé sur la censure de certaines questions orales et le rejet systématique des initiatives des députés relatives au débat général, projets de loi et commissions d'enquête. Aucun député n'a relevé que l'actuel projet de loi propose une session unique du Parlement d'une durée de dix mois minimum pouvant être prolongée à la demande du Premier ministre. Projet qui donne aussi aux sénateurs le droit de faire des propositions de lois relatives à l'aménagement du territoire, organisation locale et découpage administratif et le changement de l'expression "Programme du gouvernement" par "Plan de travail du gouvernement". Lakhdar Benkhellaf, président du groupe parlementaire du parti El-Adala, nous a déclaré que le problème ne réside pas dans la réglementation en vigueur mais dans son application. L'ancienne loi comme celle qui se propose de l'amender stipule que le gouvernement doit présenter son programme et son bilan. "Malheureusement, depuis 2012, le gouvernement Sellal n'a présenté ni son programme ni son bilan. En matière de questions orales, c'est le bureau de l'Assemblée qui décide de la recevabilité ou non. Nous avons, à ce jour, des questions orales datant de trois ans", déplore-t-il. Le même député cite l'exemple de sa question orale relative à la présence de l'ex-ministre de l'Energie, Chakib Khelil, à la réception donnée par l'ambassade d'Algérie au Etats-Unis, dans le cadre de la célébration du 1er Novembre. "Ni débat, ni projet de loi, ni enquête parlementaire. C'est une législature catastrophique par rapport aux précédentes", déplore le député d'El-Adala. Plus de 300 interpellations orales sont en instance. Une nouvelle disposition, contenue dans le projet de loi régissant les relations entre le gouvernement et le Parlement, astreint les ministres à répondre aux questions orales dans un délai de 30 jours. Ce projet de texte sera voté lundi prochain. Il sera aussitôt transmis au Conseil de la nation. Il y a consensus pour ouvrir la prochaine session parlementaire, en septembre 2016, avec ce nouveau texte, nous a affirmé le président du groupe parlementaire du RND, Mohamed Guidji. Même si de nombreux élus que nous avons approchés se réjouissent de la contrainte des délais posés aux ministres dans le nouveau texte de loi, ils craignent que le bureau de l'Assemblée nationale ne tergiverse pour entraver l'initiative parlementaire. Jouer sur les vices de forme pour rejeter une question orale ou écrite gênante est un exercice auquel s'est déjà adonné dernièrement le bureau de l'Assemblée nationale. C'est en recourant à un argument pareil que les questions écrites des députés du PT sur les retards mis dans l'installation de l'Autorité de régulation de la presse écrite et sur l'affaire El Khabar sont passées à la trappe. Djelloul Djoudi renchérit : "Bien entendu, les questions orales nous arrangent davantage car la réponse des membres de l'Exécutif est retransmise en direct sur la chaîne terrestre. Cela nous ouvre le droit de répliquer si les arguments avancés ne sont pas convaincants. Quant aux réponses aux questions écrites, elles sont seulement publiées dans le journal des débats de l'APN. C'est au député de consentir l'effort de la médiatisation." Le FLN a répliqué violemment à ces critiques en accusant leurs auteurs "de vouloir donner l'impression de prendre en charge les préoccupations des citoyens". Selon un ancien vice-président de l'APN, l'accumulation des questions orales et, dans une moindre mesure, de questions écrites, ne relève pas de motivations politiques. Les considérations sont d'un autre registre. "Indubitablement, des ministres ont peur de descendre dans l'hémicycle. D'autres ont un agenda qui les rend continuellement indisponibles pour rendre des comptes aux parlementaires", poursuit-il. Nissa Hammadi