Le Kremlin craignait que Maskhadov, qui avait “résolument rompu” avec le chef de guerre radical Chamil Bassaïev, avait déclaré une trêve et proposait de s'asseoir à la table des négociations, soit considéré par l'Occident “comme le leader d'un Sinn Féin tchétchène”. L'argument du Kremlin, selon lequel il n'était pas possible de discuter avec Maskhadov car il ne représentait plus rien en Tchétchénie, “devenait de plus en plus faible”, d'autant que la trêve décrétée durant le mois de février avait globalement été respectée. “Mais maintenant, l'argument est incontestable : il n'y a vraiment plus personne à qui parler”, et la situation sur le terrain “va changer” de façon radicale, constate le quotidien Izvestia. Aslan Maskhadov, président indépendantiste de la république rebelle du Caucase, qui était traqué depuis plus de cinq ans par les forces fédérales russes, a été tué mardi dernier lors d'une opération spéciale, à Tolstoï-Iourt, un petit village situé à seulement une dizaine de kilomètres au nord de Grozny, la capitale tchétchène. “L'arrestation ou l'élimination de Maskhadov n'ont jamais été un objectif impossible à atteindre du point de vue de la tactique militaire : la petite Tchétchénie est pleine d'informateurs (...). Il n'était pas difficile de suivre ses déplacements”, souligne Izvestia. “On peut donc supposer qu'il ne s'agit pas d'un succès fortuit des services spéciaux, mais d'une décision prise au plus haut niveau.” Et si “les services spéciaux fêtent la victoire, les experts craignent l'escalade des opérations en Tchétchénie”, note le journal des affaires Vedomosti. Car après Maskhadov, “c'est Chamil Bassaïev ou Dokou Oumarov, deux chefs connus pour leurs positions intransigeantes vis-à-vis de Moscou, qui le plus probablement seront à la tête des combattants”, souligne aussi le quotidien Kommersant. Maskhadov ne pourra être remplacé : “Sa situation de président élu, et donc pendant longtemps légitime, était unique”, note Izvestia. “Il n'y a aucun autre leader "légitime" dans la résistance (tchétchène). Il ne reste que Bassaïev, une personnalité idéale pour compromettre l'idée même de négociations (...) et la réputation de la résistance (tchétchène) en Occident.” R. I./Agences