Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a déclaré, hier, que l'année 2017 s'annonce difficile, tout en écartant le recours à des mesures d'austérité. "Notre politique n'est pas basée sur l'austérité, mais sur le développement économique", a martelé, à plusieurs reprises, M. Sellal pour qui "l'essentiel est d'avoir pu assurer la sécurité". Dans son intervention, au cours de la réunion gouvernement-walis qui s'est tenue hier au Palais des Nations, à Club-des-Pins, et qui a été élargie, cette fois-ci, aux partenaires économiques et sociaux, le Premier ministre a déclaré qu'il n'y aurait ni augmentation des salaires ni recul sur la suppression de la retraite anticipée et proportionnelle. "On vit des conditions difficiles, on ne peut pas, dans les conditions actuelles, maintenir ce système de retraite et augmenter les salaires sans toucher au budget d'équipement." Il poursuit : "Le gouvernement n'a pas l'intention de toucher aux acquis des travailleurs. Il s'agit de trouver une issue pour ne pas compromettre l'avenir des générations futures." La règle 51/49 sera également maintenue. Dans le nouveau modèle économique, la croissance sera dorénavant cherchée au sein de l'entreprise, tout en consolidant la justice sociale, poursuit M. Sellal qui rappelle que 30 millions d'euros sont consacrés annuellement pour les transferts sociaux. Selon lui, le pays a réalisé un taux de croissance de 3,5% en 2016 et compte rester sur cette lancée l'année prochaine. Le nombre des investissements déclarés, ces trois dernières années, a atteint les 24 836, tandis que les crédits économiques demeurent en progression de 10%. Sellal : "Ne m'enterrez-pas, jetez-moi plutôt à la mer" Le Premier ministre avoue que pour la réalisation des projets de logements, le gouvernement a eu recours aux regroupements nationaux-étrangers, faute de trouver des entreprises locales en mesure de les prendre entièrement en charge. Pour ce qui est des collectivités locales, il a appelé les walis à accroître l'offre foncière et la simplification des procédures administratives et les invités, aussi, à améliorer la prestation des services publics et à assurer la maintenance des infrastructures. Sans aucune transition, le Premier ministre déborde sur l'entretien des cimetières : "Ne m'enterrez pas. Jetez-moi plutôt à la mer. Nos cimetières sont dans un état catastrophique. Pourquoi ? Veut-on tous aller en enfer ?" Sur sa lancée, il poursuit : "Pour le bien du pays, je suis prêt à négocier avec le diable. Mais je n'accepte pas que le syndicaliste fasse de la politique." Il salue dans ce sens l'intervention du SG de la Centrale syndicale autour du consensus et la concertation avec, tout de même, une pointe d'ironie : "Il parle comme un ministre et non comme un syndicaliste." Permis de conduire biométrique et carte électronique d'immatriculation : lancement en 2017 Pour sa part, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Bedoui, a exhorté les walis à affranchir les projets d'investissement des entraves bureaucratiques. Cette réunion "intervient dans une conjoncture difficile sur le plan économique et de plus en plus complexe sur le plan sécuritaire, tant dans les pays voisins qu'à travers le monde", a-t-il ajouté, estimant qu'il est devenu indispensable de procéder à la réforme des finances et de la fiscalité locale. Mais, surtout, éviter les surcoûts des projets. Noureddine Bedoui a annoncé que le permis de conduire biométrique et la carte électronique d'immatriculation des véhicules entreront en vigueur progressivement à partir de 2017. Il a aussi parlé de l'activation de plusieurs prestations à distance, dès la mise en place du cadre opérationnel nécessaire à la signature électronique. Le ministre des Finances a, lui, détaillé les principaux axes de la réforme de la fiscalité locale, articulée autour de l'élargissement et la réorganisation de l'assiette fiscale, l'actualisation de certaines bases d'imposition ainsi que la fiscalité de l'activité agricole. Le ministre des Finances a soutenu que les APC ont, pour la plupart, une capacité de financement "négative" et restent, de ce fait, dépendantes des dotations budgétaires de l'Etat. Le ministre a plaidé en faveur de l'augmentation de la taxe foncière qui ne représente actuellement que 10% de la valeur du marché. Il a, par ailleurs, mis l'accent sur la soutenabilité des équilibres budgétaires, dans un contexte d'effondrement du marché pétrolier. Gel de certains projets d'équipements Le ministre des Finances a annoncé le gel d'un certain nombre de projets d'équipements, sollicitant les walis à soutenir fortement cette démarche dont la réussite dépend du respect par tous de la discipline budgétaire. En revanche, il a affirmé que les recettes fiscales sont passées de 91 milliards de dinars en 2000 à 410 milliards de dinars en 2015. Soit une augmentation de 348%. Quant à la fiscalité locale, elle est passée de 30% dans les années 1990 à seulement 10% actuellement. Les composantes de la fiscalité locale demeurent concentrées au niveau de quatre impôts totalisant 98% des recettes de la fiscalité locale. Il s'agit de la taxe sur l'activité professionnelle (TAP) avec 58%, de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) avec 35%, la vignette automobile avec 2,7% et l'impôt forfaitaire unique avec 2%. Le ministre de l'Habitat, lui, a indiqué que les délais de la mise en conformité des constructions seront allongés encore une fois, sans en préciser la durée. Le ministre de l'Industrie et des Mines a fait part du lancement des travaux de réalisation de 50 parcs industriels destinés à l'investissement avant fin mars prochain. Abordant le rapport sur le climat des affaires rendu public récemment par la Banque mondiale, il a souligné que la mise en œuvre de mesures d'encouragement prises par le gouvernement a permis des améliorations, puisque c'est la première fois que le pays progresse dans ce classement, gagnant 7 places. Selon les indicateurs de cette institution financière, la progression est considérable comme pour le permis de construire qui a gagné 42 places passant de la 119e à la 77e place, pour le paiement des impôts et taxes qui a gagné 15 places et pour le raccordement à l'électricité qui a gagné 12 places. Ce rapport fait ressortir que l'Algérie compte parmi les pays qui ont introduit le plus de réformes dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (Mena) en 2016, a ajouté le ministre. Les travaux de cette rencontre se sont poursuivis à huis clos au niveau de trois ateliers. Le premier atelier concerne "le rôle des collectivités locales dans la promotion de l'investissement", le deuxième a pour thème "réforme des finances et de la fiscalité locale pour un développement pérenne" et, enfin, le troisième étudiera les mesures de modernisation du service public. La matinée d'aujourd'hui sera consacrée à la lecture en plénière des recommandations issues de ces trois ateliers. Nissa Hammadi