Reconduit par le roi Mohammed VI à la tête du gouvernement, le chef du gouvernement Abdelilah Benkirane semble être de plus en plus isolé. Il est considéré par ses rivaux d'être à l'origine de "l'impasse politique que traverse le pays". Le Maroc est sans gouvernement depuis six semaines, en raison de l'incapacité du chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, à former un nouvel exécutif consensuel. N'ayant pas arraché la majorité absolue lors des législatives du 7 octobre dernier (125 sièges), le leader du Parti de la justice et du développement (version marocaine des Frères musulmans) espérait composer avec ses alliés, l'Istiqlal (46 sièges) et le Parti du progrès et du socialisme (PPS, 12 sièges) pour former une nouvelle équipe gouvernementale. Même s'il lui manquait 15 sièges pour avoir cette majorité absolue, le SG du PJD pensait que la tâche allait lui être facilitée par d'autres partis que les postes ministériels étaient censés, selon lui, aiguiser leurs appétits. Ce ne fût pas le cas et Benkirane s'est retrouvé dans une impasse aggravée par des rivalités internes au sein de sa propre coalition, comme l'a rapporté la presse marocaine. Le SG du PJD écarte en effet toute exclusion de l'Istiqlal de sa future formation gouvernementale, ce qui explique en partie ce blocage. Entré en négociations avec Aziz Akhannouch, élu député en tant que candidat du Rassemblement national des indépendants (RNI), M. Benkirane a rejeté les conditions de ce nouveau venu en politique et non pas moins une des plus grosses fortunes africaines et un proche du roi marocain. Outre l'exclusion de l'Istiqlal du prochain exécutif, M. Akhannouchi avait exigé des postes ministériel-clé et une place dans la future coalition l'Union constitutionnelle. Excédés par ce blocage, des responsables politiques accusent le chef du gouvernement d'être le responsable de cette "impasse politique" qui risque de s'inscrire dans la durée. "Il faut que Benkirane donne des explications crédibles à ce blocage", a déclaré le leader du Parti authenticité et modernité (PAM), Ilyas El-Omari, a rapporté le journal électronique Le Desk. Né de la fusion de cinq partis en 2008, le PAM était arrivé derrière le PJD aux législatives du 7 octobre avec 102 sièges. Son secrétaire a écarté lundi toute éventuelle intégration de la coalition formée par le PJD, regrattant au passage "le spectacle offert par les alliés de Benkirane qui se déchirent entre eux", selon toujours la presse locale. "Le PAM a définitivement choisi le camp de l'opposition", a tranché M. El-Omari. Happé par sa tournée africaine, qu'il consacrée pour préparer le retour du Maroc dans le giron de l'Union africaine, le roi Mohammed VI pourrait être amené à s'impliquer personnellement dans ce dossier. Deux scénarios sont donc possibles en cas d'échec de Benkirane dans sa mission de former le nouveau gouvernement : une intervention du roi pour la relance des tractations ou la désignation d'une personnalité issue de la coalition de l'opposition qui aura la charge de former le futur exécutif. Le bloc formé par le PAM, le RNI, le Mouvement populaire (MP), le Parti socialiste unifié (PSU) et l'Union constitutionnelle (UC, libérale) rassemble 203 sièges, un nombre suffisant pour former le gouvernement. Lyès Menacer