L'auteur d'Anna Gréki. Les mots d'amour, les mots de guerre, a présenté son livre lors d'un café littéraire organisé par "l'espace des lecteurs" à la bibliothèque de la ville. Impressionnés par le parcours exceptionnel de cette poétesse, les Boufarikois pensent à baptiser la place publique du nom de cette héroïne de la révolution algérienne. À l'occasion du 3e café littéraire de "l'espace des lecteurs" à Boufarik, l'écrivain Abderrahmane Djelfaoui, journaliste et écrivain, a présenté son livre Anna Gréki. Les mots d'amour, les mots de guerre. Cet ouvrage, édité par Casbah, revient sur le parcours de cette poétesse qui a combattu pour la cause nationale durant la révolution. Subjugué par le parcours fabuleux d'Anna Gréki pendant l'occupation française, Abderrahmane Djelfaoui explique dans sa présentation : "Ce qui m'a incité à écrire cet ouvrage, c'est cette volonté et audace qu'avait Anna Gréki pour écrire un livre de poèmes tout en étant cloîtrée dans une cellule occupée par une dizaine de combattantes." À ce propos, il a indiqué : "Aucune de ses compagnes de cellule comme Zhor Zerrari, Djamila Bouhired, Claudine la Cascade, Annie Steiner, Louisette Ighilahriz et bien d'autres militantes ne savaient qu'elle écrivait un livre", a indiqué l'auteur. Et d'ajouter : "Avec une extrême discrétion, Anna écrivait sous un tissu qu'elle mettait sur ses genoux, car les prisonniers n'avaient pas le droit d'écrire en prison." Sur cette "résistance" avec les mots, l'auteur a informé l'assistance qu'il "y avait six poétesses dans une même cellule. À côté, dans la cellule des hommes, se trouvait le poète Moufdi Zakaria et le compositeur El-Badji. La révolution n'était pas uniquement dans les maquis mais aussi dans les prisons de Serkadji et dans les rues", a fait remarquer l'orateur avant de lire un des poèmes d'Anna Gréki. Lors de cette rencontre, le conférencier est revenu sur l'histoire d'Anna Gréki dans les moindres détails, et ce, sans oublier de raconter son histoire d'amour avec Sid Ahmed Inal. Un enfant de Tlemcen qui a rencontré Anna Gréki en France lorsqu'il était président de la Fédération des étudiants algériens. Ahmed a eu une activité inlassable dans le monde estudiantin. Il y prône partout la lutte armée comme solution au problème algérien. Il rentre à Tlemcen pour rejoindre le maquis en octobre 1956, pour devenir officier de l'ALN. À la suite d'une information, une embuscade lui est tendue près de Moulay Slissen par des tirailleurs ainsi que par des blindés nomadisés de la 13e. L'intellectuel fut arrêté et torturé jusqu'à la mort. "Après lui avoir arraché les yeux, l'officier tortionnaire a décidé de le bruler vif", a précisé Abderrahmane Djelfaoui. Anna Gréki, de son vrai nom Anna Collette Grégoire, a passé son enfance à Menaa, dans les montagnes des Aurès, où son père était instituteur de profession. Dès son jeune âge, elle commençait déjà à écrire des poèmes sur sa région chaouie et sur sa patrie l'Algérie. La poétesse interrompt ses études supérieures de lettres à Paris pour militer activement au combat pour l'indépendance de l'Algérie. Par la suite, elle travaille comme institutrice à Annaba puis à Alger, et en parallèle elle milite au PCA comme membre des "combattants de la libération". Arrêtée par les parachutistes de Massu en 1957, elle est torturée avant d'être internée durant deux années à la prison Barberousse d'Alger. En 1959, Anna Gréki rejoint son mari Jean Malki à Tunis où sera publié son premier recueil Algérie, Capitale Alger, préfacé par Mostefa Lacheraf, qui sera publié en Tunisie puis en France en 1963. Elle rentre en Algérie à l'indépendance en 1962. En toute modestie, elle s'inscrit à l'université d'Alger pour terminer sa licence sous le nom d'Anna Malki. Elle sera plus tard professeur de français au lycée Emir Abdelkader à Alger. Anna Gréki a publié également des textes poétiques dans Révolution Africaine (hebdomadaire du FLN créé à Alger en 1963). Le 6 janvier 1966, elle décède à l'âge de 35 ans suite à une hémorragie, alors qu'elle était enceinte de 7 mois. Elle laisse un second recueil Temps forts, qui paraîtra la même année chez Présence Africaine à Paris. Anna Gréki a consacré sa vie pour que l'Algérie soit libre et indépendante. À travers ce café littéraire, et grâce à cet ouvrage d'Abderrahmane Djelfaoui, les Boufarikois ont découvert le parcours fabuleux de cette fille des Aurès. D'ailleurs, à Boufarik, on pense déjà à baptiser la place publique du nom de cette héroïne de la révolution algérienne. K. FAWZI Anna Gréki. Les mots d'amour, les mots de guerre, de Abderrahmane Djelfaoui, Editions Casbah (collection essais), 2016, 192 pages.