Le groupe Freeklane revient avec l'album Nomad, paru aux éditions Padidou, à travers lequel il explore de nouveaux genres, traite de nouveaux sujets, avec ses influences africaines, algériennes et occidentales. La sortie du très attendu Nomad, deuxième album du groupe Freeklane, lancé en grande pompe le 28 décembre dernier, est le fruit de plusieurs années de travail du groupe, qui aura consacré trois ans pour élaborer ce nouvel opus. Après Lalla Mira et le grand succès rencontré auprès du public en 2013, le groupe de Chemseddine Abbacha revient avec un son plus hétérogène, ondoyant, mais qui reste assurément attaché à ses origines berbères et africaines. Avec ses onze chansons, Nomad est un voyage à travers l'Afrique et le Maghreb, dans leur diversité, leur beauté et leur fugacité, mais aussi dans leurs questionnements et leurs problèmes. Chaque chanson de l'album est centrée sur un thème particulier. Wana Ndour, premier titre du disque, évoque les problèmes rencontrés par la jeunesse algérienne, entre chômage, manque de repères, et les fléaux qui la condamnent, tels que la drogue et l'alcoolisme. Porté par un mélange de reggae et de musique africaine, avec djembé et tambours, cette chanson met en avant la voix rauque du leader qui assure aussi les chœurs. Sur un tempo lent, ce morceau met en exergue la difficulté de survivre dans cette société qui met au second plan les attentes et les préoccupations de la jeunesse : "J'ai sillonné tous les rivages, en espérant casser les barreaux de ma cage (...) Je me contente du voyage, je tourne autour du quartier, j'attends mon présage." Le premier clip dévoilé avant la sortie officielle du CD est Amazighia, avec plus de cent mille vues sur la plateforme de vidéos en ligne Youtube, il est le titre le plus représentatif de la diversité de ce bel album. Si le fond traite de la fierté amazighe, la forme est quant à elle une très belle démonstration des influences africaines de la formation, avec ses mélopées gnawi, et le djembé, qui refait son apparition, mais accompagnée cette fois-ci par la guitare électrique de Nazim Kridèche et celle de Saïd du groupe Tikoubawin. L'autre particularité de cette chanson est le changement de rythme qui s'y produit à partir de la troisième minute. Le mouvement reste stable jusqu'au dernier quart de la chanson, qui enregistre un syncopé laissant place à des youyous de femmes targuis, à la voix plus énergique du chanteur, et à une explosion des guitares, électrique, acoustique, et au kerkab. Mali ana, une chanson dédiée à l'amour, à la solitude et à l'émigration. Explorant plusieurs registres, comme le raï et le gnawi, la voix du chanteur est ici cristalline, plus limpide, avec une émotion palpable qui se dégage à chaque parole. Barakate, titre qui annonce d'ores et déjà le contenu de cette chanson de 4:40 minutes. Sur une ouverture de guitare classique, elle évoque des sujets tels que le déclin du nationalisme, la drogue, la pauvreté ou encore la démagogie des politiciens. Face à ces fléaux, le chanteur déclame l'inaction des pouvoirs publics, qui laissent toute une jeunesse en proie à aux doutes, aux peurs, et au désenchantement : "Je suis las de cette vie, la drogue est devenue une nourriture, le nationalisme est sur le point de mourir dans l'indifférence générale, Barakat !" En somme, Nomad marque l'évolution tant musicale que thématique du groupe Freeklane, qui affirme, avec ce second opus, sa grande maîtrise instrumentale et vocale, porté par le charismatique Chemseddine Abbacha, et sa capacité de passer d'un registre à un autre, d'un thème à un autre, avec la même fraîcheur et hardiesse. À noter que le groupe entamera une tournée pour cet album à partir du mois de février prochain. Yasmine Azzouz