Des programmes d'importation, déposés au ministère entre août et septembre de l'année passée, et qui devaient être libérés au mois de novembre, ne l'ont été qu'au début du mois en cours, indique M. Kerrar. La pénurie de médicaments, qui touche depuis le début de l'année plus de 200 DCI (dénomination commune internationale), risque de s'installer dans la durée. Les représentants de la Fédération algérienne des médicaments (Fam), regroupant les principaux opérateurs pharmaceutiques Unop, Snapo et Adpha, sont, en tout cas, formels : le risque de ruptures cycliques plane plus que jamais sur le marché national. Ils appréhendent d'ores et déjà une pénurie au plus tard en avril ou mai prochains. La cause ? Au-delà de la large liste des médicaments actuellement en rupture pour faute de libération par la tutelle des fameuses autorisations d'importation aussi bien pour les produits finis que pour les intrants et autres matières premières indispensables à la fabrication locale, il y a la tension sur plusieurs autres médicaments dont les stocks arriveront bientôt à épuisement. C'est ce qu'ont expliqué, en effet, hier en conférence de presse commune, Abdelouahed Kerrar, président de l'Union nationale des opérateurs (Unop), Hassiba Boulmerka, présidente de l'Association des distributeurs pharmaceutiques d'Algérie (Adpha), et Fayçal Abed, vice-président du Syndicat national des pharmaciens d'officine (Snapo), qui ont pointé du doigt la "gestion approximative" des autorités sanitaires. "Le mode de gestion de la filière pharmaceutique, s'il devait perdurer, signifie clairement que les ruptures actuelles sont appelées à s'aggraver et que le marché national est appelé à revivre le cycle des pénuries chroniques", ont-ils alerté, non sans regretter d'avoir "épuisé toutes les voies du dialogue" avec le ministère de la Santé. "Nous attirons l'attention des autorités depuis plusieurs années, mais rien n'a changé. Si nous en sommes là aujourd'hui, c'est parce que nous avons vainement tout tenté pour trouver des solutions dans un cadre de dialogue avec les autorités. Notre sortie d'aujourd'hui est le dernier recours face à la situation anxiogène affectant notre filière", a regretté M. Kerrar, qui veut ainsi "dégager toute responsabilité" quant à la pénurie des médicaments, laquelle affecte aussi bien les patients et les personnels médicaux que les opérateurs pour qui l'impact financier risque d'être lourd. Les médicaments actuellement en rupture, souligne le représentant du Snapo, freinent les traitements médicaux de quasiment tout l'ensemble des pathologies. À l'administration du département d'Abdelmalek Boudiaf, il reproche notamment la décision "incompréhensible" de baisser les quantités de médicaments et/ou des matières premières à importer, alors que des affectations "arbitraires" de quotas de produits sont données à certains "privilégiés" parmi les opérateurs. "Nous comprenons parfaitement la situation de crise que traverse le pays, mais ce n'est pas une raison pour priver les patients des médicaments indispensables au traitement de leur maladie", a dénoncé M. Kerrar qui rappelle que des programmes d'importation, déposés au ministère entre août et septembre de l'année passée, et qui devaient être libérés au mois de novembre de la même année, ne l'ont été qu'au début du mois en cours. Le même Kerrar affirme que près de "50%" des programmes attendent à ce jour d'être autorisés par le ministère. Dans son intervention à la même occasion, Nabil Mellah, membre et ex-président de l'Unop, n'a pas été de mainmorte avec le ministère. De la pauvreté de la réglementation à la bureaucratie, en passant par les restrictions budgétaires décidées dans la foulée de la crise économique, M. Mellah a énuméré une série de blocages pénalisant la filière du médicament. Une situation, regrette-t-il, que le ministère pouvait aisément surmonter s'il avait juste pris en compte, souligne-t-il, "nos propositions que nous réitérons depuis plusieurs années". Farid Abdeladim