Il ne se passe pas un jour sans qu'une interpellation ou une arrestation soit signalée à travers le pays concernant précisément l'exercice de ces libertés consacrées, du reste, par la Constitution. Quelques semaines après la proclamation de sa naissance à Oran, le Forum social algérien (FSA) va étrenner aujourd'hui sa première action de terrain. Dans un communiqué transmis à notre rédaction, le FSA, un mouvement composé d'associations, de syndicats, de ligues des droits de l'homme et de simples citoyens(es), appelle à rejoindre les rassemblements qui se tiendront aujourd'hui à Alger, devant le ministère de la Justice, à Oran, ainsi qu'à Béjaïa sur la Place de la liberté d'expression Saïd-Mekbel. Cette démonstration, première du genre, est organisée "afin de protester contre les dénis de liberté et revendiquer le respect des droits des algériens(es) à la liberté et à la justice, d'exiger publiquement la libération des détenus politiques, d'opinions et de confessions, d'exiger le droit à une justice égale pour tous, d'exiger l'arrêt de la répression sous toutes ses formes et le respect inconditionnel des droits des personnes emprisonnées et leurs mandants". Quel curieux paradoxe en effet ! La nouvelle Constitution, loi suprême du pays, comporte, il est vrai, quelques avancées en termes de libertés, mais celles-ci sont vite remises en cause par la répression constatée sur le terrain. Il ne se passe pas un jour sans qu'une interpellation ou une arrestation ne soit signalée à travers le pays concernant précisément l'exercice de ces libertés. L'article 50 de la Constitution, pour ne prendre que celui-là, stipule pourtant clairement que "la liberté de la presse écrite, audiovisuelle et sur les réseaux d'information est garantie. Elle n'est restreinte par aucune forme de censure préalable. Cette liberté ne peut être utilisée pour attenter à la dignité, aux libertés et aux droits d'autrui. La diffusion des informations, des idées, des images et des opinions en toute liberté est garantie dans le cadre de la loi et du respect des constantes et des valeurs religieuses, morales et culturelles de la nation. Le délit de presse ne peut être sanctionné par une peine privative de liberté". Pour de nombreux militants ou de simples internautes, il est effarant qu'après une révision constitutionnelle qui consacre de manière explicite le droit à l'expression notamment, le pouvoir continue à être réfractaire à tout regard critique porté sur lui. Dès qu'une affaire embarrassante au sujet de sa mauvaise gestion surgit notamment sur les réseaux sociaux, voilà que le pouvoir perd son sang froid et renoue avec ses réflexes d'antan en procédant à l'arrestation de l'auteur de la dénonciation publique, qu'il s'agisse d'un cas avéré de malversation ou d'une atteinte aux droits de l'Homme. Interrogé hier sur le pourquoi de cette action d'envergure nationale, Hakim Addad, l'un des membres Forum social algérien nous a précisé que "certaines libertés qui n'avaient jamais été réprimées auparavant sont aujourd'hui directement touchées. Que tout le monde s'en offusque sur les réseaux sociaux est assurément une bonne chose, mais il est nécessaire de donner un prolongement à cette indignation par de véritables actions sur le terrain". Mohamed-Chérif Lachichi