Le ministère du Commerce s'est occupé en priorité de l'importation de la banane comme s'il s'agissait d'un produit vital pour la survie de l'Algérien. L'ouverture par le ministère du Commerce du contingent quantitatif à l'importation des bananes, du 11 au 14 mars en cours au titre du 1er semestre de l'année 2017, domine le débat. Les Algériens se demandent pourquoi le département de Tebboune a mis de la célérité à fixer en premier la norme à l'importation de ce fruit, alors qu'il n'est pas l'aliment le plus essentiel dans le menu quotidien de l'Algérien. Sur le site Internet du ministère du Commerce, seul l'avis d'appel pour l'octroi des quotas d'importation de la banane, accompagné d'un cahier des charges, est lancé. Une ouverture qui a suivi la déclaration du ministre du Commerce par intérim, Abdelmadjid Tebboune, et selon laquelle les quotas d'importation de tous les produits allaient être octroyés graduellement. Il est vrai que le premier contingent de 90 000 tonnes, qui sera suivi par ailleurs d'un deuxième au second semestre de 2017, permettra aux Algériens d'accéder à ce produit à un prix probablement raisonnable. Mais est-ce la priorité au moment où les consommateurs sont privés de produits plus essentiels ? On se demande alors pourquoi on a commencé par la banane alors que les licences sur d'autres produits tardent à venir, causant des pénuries portant atteinte au pouvoir d'achat des Algériens. On citera, entre autres, l'ail, actuellement, cédé à partir de 1 600 DA le kilogramme. D'où cette autre question : pourquoi les pouvoirs publics tentent de focaliser l'opinion publique sur la banane et pourquoi en ce moment précis ? Car, le ministère du Commerce pouvait bien commencer par un avis d'appel d'octroi des quotas pour l'automobile, le rond à béton ou encore les agrumes. Visiblement, en temporisant pour l'octroi des licences, le gouvernement a voulu gagner plus de temps pour réduire la facture des importations en devises. Mais cette façon de faire a eu pour conséquence de provoquer des pénuries et donc un affolement du marché qui enregistre des augmentations excessives des prix des produits essentiels. Le ministre du Commerce par intérim a affirmé récemment que son département soumettra bientôt au Premier ministère un cahier des charges pour réguler toutes les importations, le ministère du Commerce voudrait justifier "l'octroi graduel des quotas". Soit. Mais en attendant, le marché connaît une dérégulation inquiétante. Les spéculateurs se sont saisis de l'indisponibilité en quantité suffisante sur le marché de beaucoup de produits pour exagérer leurs profits. Cela est valable pour tous les produits qui ont tendance à se raréfier sur le marché du fait de la suspension des importations. Le cas de l'automobile est édifiant. Aujourd'hui, aucun Algérien ne peut se permettre d'acquérir un véhicule neuf à cause des quotas non encore définis. Quand bien même le ministère lancerait l'avis d'attribution des quotas, le contingent ne sera pas suffisant pour faire face à la forte demande du marché, d'une part, et plusieurs concessionnaires automobiles seront privés des licences à cause du cahier des charges qui impose l'installation d'une industrie et d'une unité de sous-traitance pour souscrire aux quotas et aux licences. Le cadrage et la stratégie déployée par le gouvernement ne justifient en rien la décision de prioriser la banane sur le reste des produits dont les citoyens et l'économie nationale ont besoin. À moins que le gouvernement ne veuille signifier que l'année 2017 sera celle des priorisations. Mais encore faudra-t-il qu'il s'explique sur cette stratification qui a voulu qu'un fruit comme la banane intègre, aux yeux de Tebboune, l'urgence alimentaire nationale. D'aucuns pensent qu'il y a anguille sous peau de banane. Ils n'ont pas forcément tort. FARID BELGACEM