L'Exécutif pourra-t-il contrer les pratiques spéculatives récurrentes qui laminent le pouvoir d'achat des ménages chaque mois sacré ? Le gouvernement semble réunir toutes les conditions requises pour que la population passe le mois de Ramadhan dans la sérénité. Pour atteindre un tel objectif, l'Exécutif veut garantir une offre suffisante en produits alimentaires et un niveau de prix accessible à tous les consommateurs. La feuille de route fixée pour le mois sacré prévoit, entre autres dispositions, la lutte efficiente contre toute pénurie et flambée des prix. Il doit assurer ainsi une disponibilité régulière des produits de large consommation. En ce sens, la commission interministérielle chargée de la délivrance de licences d'importation a attribué, rappelons-le, 19 autorisations pour introduire quelque 20 000 tonnes de viandes rouges fraîches sur le marché national. La forte demande de cet aliment durant le mois de jeûne, attendu pour le 27 mai, oblige les pouvoirs publics à maintenir un approvisionnement stable des espaces commerciaux afin d'assurer des prix de la viande à la portée des bourses moyennes. Près de 50% de ces quantités seront importés d'Espagne, alors que le reste proviendra de France, d'Italie, du Brésil et de Nouvelle-Zélande. Mieux, 17 000 autres tonnes de viandes rouges ont déjà été importées depuis le début de l'année 2017 à travers des licences d'importation attribuées au titre de l'année 2016. Le ministère du Commerce avait ouvert, rappelle-t-on, entre le 1er et le 15 avril dernier les contingents quantitatifs pour l'importation des produits et marchandises au titre des licences d'importation pour l'année 2017. Il s'agit essentiellement de viande bovine fraîche ou réfrigérée, de fromages, de citrons, de pommes, de bananes, d'orge, de maïs, de tourteaux de soja, de concentré minéral vitaminé et de double concentré de tomates. C'est avec toutes ces quantités que la tutelle compte inonder le marché national à la veille du mois de carême et, par là même, espérer une répercussion baissière sur les prix, profitable aux familles les plus nécessiteuses. Encore que les pouvoirs publics attribuent rapidement les licences d'importation, notamment pour l'ail, le citron et le double concentré de tomates. Cette bataille n'est, en revanche, pas gagnée d'avance d'autant plus que le département du Commerce a décidé d'arrêter l'importation de viande congelée, très prisée par une grande frange de la population pour son prix abordable. L'argument avancé par le ministre de l'Habitat et ministre du Commerce par intérim, Abdelmadjid Tebboune, est que les capacités nationales en viande ovine couvrent la demande. Cette décision est nécessaire, a-t-il souligné, tout en précisant qu'il a proposé la promulgation d'un décret autorisant la vente directe de produits alimentaires par le producteur. Une telle mesure, a-t-il expliqué, contribuera de manière efficace à juguler la spéculation et le monopole, notamment pour ce qui est des produits alimentaires de large consommation. Dispositif de régulation Le ministère prévoit, par ailleurs, la poursuite de la campagne de sensibilisation des commerçants distributeurs (grossistes et détaillants) pour maintenir l'approvisionnement permanent des citoyens en produits à forte demande en cette période, le respect des prix réglementés, le maintien des tarifs à des niveaux raisonnables et la lutte contre toute pratique spéculative comme la rétention des stocks de produits. Un dispositif spécifique au contrôle sera, en outre, mis en œuvre à partir du 25 mai grâce auquel les agents veilleront au respect des règles de transparence et de loyauté des transactions commerciales, ainsi qu'à la conformité des biens et des services proposés à la vente. Dans son plan d'action de régulation, la tutelle va en principe reconduire l'organisation des marchés spécifiques à cette occasion, en collaboration avec l'UGTA et l'Union générale des commerçants (UGCAA). Dans la capitale, les services de la wilaya prévoient l'ouverture durant le Ramadhan des "marchés solidaires" dits "rahma" à travers 57 communes pour permettre aux citoyens de s'approvisionner en produits d'alimentation générale et en fruits et légumes à des prix accessibles. Sur un autre registre, les cadres du ministère ont été instruits d'assurer un suivi régulier de l'approvisionnement du marché et une observation quotidienne efficace de la mercuriale, accompagnés d'une analyse des données recueillies et exploitées. Il est question, dans ce sens, de surveiller les conditions de distribution de ces produits et de s'enquérir de la cause d'éventuelles tensions et de perturbations qui pourraient les toucher. Les brigades chargées de l'observation des prix du marché sont, quant à elles, mobilisées pour le suivi de la tarification pratiquée, ainsi que leur tendance à travers l'élaboration et la communication d'un relevé. À ce propos, à moins d'un mois de ce rendez-vous, l'on enregistre une légère baisse des prix des fruits et légumes sur les marchés. Ceux du chou-fleur (60 DA), des fèves, du concombre, de la tomate, de la carotte et de l'oignon (70 DA), du poivron, de la pomme de terre (55 DA), de la courgette,... pour ne citer que ces légumes, ont connu une baisse de 10 à 20 DA ces derniers jours. L'on s'attend à une baisse plus significative à l'approche du mois sacré qui coïncidera avec l'arrivée sur le marché de nouvelles récoltes. Au grand bonheur du consommateur... Mais reste à savoir si tout ce dispositif pourra contrer les pratiques spéculatives et protéger le pouvoir d'achat des citoyens. B. K.