Ceux qui l'ont côtoyé à Béjaïa parlent de Farid Ikken comme d'un homme pieux, qui n'était pas un djihadiste ou sensible aux discours des théoriciens et idéologues de l'EI. Que s'est-il passé dans la tête de Farid Ikken qui a agressé au marteau un policier à Notre-Dame ? Comment le journaliste et doctorant en journalisme à l'université de Lorraine, à Metz, "doux comme un agneau", pour reprendre les mots de son directeur de thèse, en est-il arrivé à commettre un tel acte ? Il aurait évoqué, selon les rapports de la police, la situation en Syrie. Est-il tombé dans le piège de la propagande de l'Etat islamique (EI) ou Daech ? Portrait d'un homme qui a tenté le pire alors que rien dans son parcours ne l'orientait vers une telle impasse. Ceux qui l'ont côtoyé à Béjaïa parlent de Farid Ikken comme d'un homme pieux, mais qui n'était pas un djihadiste ou sensible au discours des théoriciens et idéologues de l'EI. Il pratiquait dans la discrétion son islam et était plutôt ouvert. À Béjaïa et à Akbou – d'où il est originaire –, certains de ses amis ne faisaient pas le Ramadhan, sont athées et d'autres sont carrément d'une autre religion, protestants en l'occurrence. Et cela n'a jamais posé problème pour lui. Farid Ikken a tenté l'aventure européenne avant de revenir en Algérie pour y repartir une nouvelle fois, trois années après. Trois années vécues en symbiose à Béjaïa parmi des amis. C'est en 2011 qu'il décide de rentrer au pays, depuis Paris où il a travaillé pour une société norvégienne. Il avait dans ses bagages un projet : un journal en ligne. Il lancera le site web, Bejaia-aujourd'hui, hébergé en Suède où il avait vécu plusieurs années. Lesquelles années ont été ponctuées d'un mariage raté. La preuve : selon ses amis proches, il n'évoque jamais son mariage, encore moins son divorce alors qu'il était prolixe lorsqu'il s'agissait de parler du métier de journaliste qu'il a exercé en Suède après avoir obtenu un master en journalisme. C'est à Paris qu'il décide de rentrer au pays et monter son projet de journal en ligne. Nous sommes fin 2011, lorsque les Béjaouis découvrent ce site, plutôt attrayant, dédié à leur wilaya. Mais sans moyens pour payer des collaborateurs et les annonceurs hésitant à placer leur publicité sur un journal en ligne, régional de surcroît, le site de Farid Ikken était inexorablement condamné à disparaître. C'est là qu'El-Kadi Ihsane d'Interface Médias, l'éditeur de Maghreb Emergent, décide de l'aider en l'autorisant à reprendre des articles de son site. Toutefois, en dépit de cette visibilité, Farid Ikken n'a pas réussi à capter la moindre publicité. Un ami journaliste l'a proposé pour enseigner en tant que vacataire à l'Insim de Béjaïa. Ce qui fut fait. Il a accompli sa tâche avec sérieux, en témoignent ses anciens étudiants, qui gardent de lui un très bon souvenir ainsi que les dirigeants de cet institut de formation privé. Et c'est à ce titre qu'il s'approchera de l'université. L'histoire d'équivalence du diplôme le dissuadera, même si à la faculté des sciences humaines et sociales de Béjaïa, le doyen l'avait très bien accueilli. Suite à cela, il collabore à El Watan. Il cherche en même temps à s'inscrire en thèse. Il est accepté par l'université de Lorraine à Metz. Mais quand son directeur de thèse a quitté la région pour Paris, Farid Ikken le rejoint. Il a réussi à se loger dans une résidence universitaire à Cergy (Val d'Oise). Il occupait un T1. Mais sans ressources – il vivait de petits boulots de traduction notamment – ses déplacements sont devenus rares, notamment du côté de Saint-Michel chez Gibert où il allait échanger ses livres et en acheter d'autres à 1 ou 2 euros. Une précarité insupportable pour un homme ambitieux. Il a pu écrire deux articles pour le site Rue 89 mais sans suite. Il y a un peu moins d'une année, il a collaboré à un site algérien, basé à Alger. Son ami ne se rappelle pas du nom de ce journal en ligne. M. Ouyougoute