Nombre de formations politiques n'ont pu cacher leur surprise par rapport à ce changement de gouvernement, au moment où d'autres partis ont tout simplement évité de se prononcer. Le limogeage du Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, et son remplacement par Ahmed Ouyahia a suscité, hier, les réactions les plus diverses au sein de la classe politique, qui, dans son ensemble, a tenu à relever ce qui est qualifié de "précipitation" dans ce changement intervenu à la tête du gouvernement, renvoyant, d'après eux, une image d'instabilité du pouvoir exécutif et d'incertitude quant à l'avenir du pays. Ainsi, le secrétaire général du mouvement Ennahda, Mohamed Douibi, voit, en effet, dans ce changement à la tête du gouvernement "un indicateur d'instabilité politique au sommet de la pyramide de l'Etat". Pour ce responsable politique, la nouvelle est d'autant plus surprenante que "Tebboune comptait parmi les hommes de confiance du Président puisqu'il lui a confié plusieurs tâches dont la dernière en tant que ministre de l'Habitat, qui a son importance en Algérie. Et même après le décès du ministre du Commerce, il avait été chargé de la prise en charge de ce département ministériel". De plus, relève M. Douibi, ce changement fait suite à l'instruction rendue publique la semaine dernière, mais dont la véracité, d'après lui, "n'a pu être vérifiée ni par le biais de l'agence officielle d'information APS ni à travers la télévision d'Etat". Ce qui dénote, selon lui, de "l'absence de l'Etat de droit et de la séparation entre les pouvoirs". M. Douibi, qui a aussi émis le souhait qu'une personnalité autre qu'Ouyahia soit désignée à ce poste, a, en même temps, espéré que le nouveau Premier ministre puisse adopter une politique "en adéquation avec la situation actuelle qui est marquée par des défis politiques, sécuritaires et sociopolitiques". L'avis du leader du Front pour la justice et le développement (FJD), Abdallah Djaballah, sur ce changement de gouvernement est plus tranchant. "C'est une farce et une mascarade en même temps qu'il y ait manipulation des plus hautes fonctions de cette manière", a-t-il estimé. Sur les raisons pouvant justifier le limogeage de Tebboune, quelques mois seulement après sa nomination, M. Djaballah s'est demandé si le départ du chef de l'Exécutif n'était pas lié à sa déclaration sur la lutte contre la corruption et sa volonté de séparer l'argent de la politique. Pour ce responsable politique, le limogeage de Tebboune donne l'impression que le chef de l'Etat ne veut pas faire de la lutte contre la corruption une priorité. "Cela veut dire que la situation du pays empire et que le clan qui dirige le pays n'a cure des intérêts de la nation", assène-t-il. La réaction de Talaie El-Houriat, le parti de l'ancien chef de gouvernement Ali Benflis, ne diffère pas de celles des autres formations politiques. Le ton est à la gravité. Le porte-parole du parti, le Dr Ahmed Adimi, estime, ainsi, que "l'Algérie est en danger", considérant que "la valse des Premiers ministres ne peut en aucun cas être la solution à l'impasse politique que connaît le pays". M. Adimi retient qu'encore une fois, "l'autorité de nomination et de limogeage reste invisible". "Les forces extraconstitutionnelles que notre parti n'a jamais cessé de dénoncer, profitant de la vacance du pouvoir à la tête de l'Etat, continuent d'usurper les prérogatives présidentielles. De ce fait, il n'y a de solution véritable à la grave crise politique et au délitement des institutions qu'à travers le retour à la légitimité populaire et au choix libre, transparent et souverain du peuple", relève-t-il, assurant que "l'Algérie est menacée dans sa stabilité et sa sécurité nationale". À l'opposé de ces formations politiques, le président de l'ANR, Belkacem Sahli, dira avoir accueilli avec satisfaction la nomination d'Ahmed Ouyahia au poste de Premier ministre, pour, dit-il, "ses qualités", lui qui est connu pour être "un homme d'Etat qui a dirigé d'importantes institutions et dirigé le gouvernement dans des conditions difficiles et complexes". M. Sahli a estimé que ces qualités font de M. Ouyahia "l'homme de l'étape actuelle en raison de ce que requiert notre pays face aux différents défis politiques, socioéconomiques et sécuritaires". À cette occasion, le président de l'ANR a réitéré "la disponibilité de son parti à apporter son soutien au programme du président de la République et le nouveau plan d'action du gouvernement avec à sa tête Ahmed Ouyahia". A. Rafa