Résumé : Nacéra espérait rencontrer l'homme de ses rêves pour réaliser toutes ses ambitions. Ses amies lui conseillèrent de changer de cap. Hélas..., à son époque, la chose était inadmissible pour la famille. Nacéra se verse encore un peu de jus avant de continuer : - Sentant le temps passer et la routine s'installer, je me renfermais de plus en plus sur moi-même. Les affaires marchaient à merveille. J'avais des couturières professionnelles sur qui je pouvais compter et des commandes qui augmentaient sans cesse. Je n'avais plus besoin de conseiller mes assistantes. Elles avaient compris que pour atteindre le succès, il faut montrer ce qu'on savait faire. C'était là le sésame de la réussite. Je pouvais enfin souffler. Je n'avais plus besoin de me rendre tous les jours à l'atelier, mais ramenais à la maison tous les travaux urgents. Des trousseaux de mariées, des robes de soirée, des tailleurs et toute la liste du prêt-à-porter de certaines de mes anciennes clientes qui ne voulaient pas changer de main. Ma chambre est devenue ce chantier que tu connais trop bien, et me voici à la quarantaine bien sonnée encore là à compter les murs et à attendre qu'un prince charmant daigne descendre de ses étoiles... Oh ! bien sûr, je ne vais pas me nourrir d'illusions, car avec l'âge, mes chances de fonder un foyer s'amenuisent. Maissa presse la main de sa sœur : -Ne dis-pas ça... Tu n'es pas aussi vieille que tu le penses...Tu es même encore très belle, et surtout très élégante. -C'est gentil à toi Maissa de tenter de me rassurer. Mais vois-tu, ma chérie, je connais mon âge, et surtout notre société... Chez nous, une fois la vingtaine bien amorcée, on est déjà traitée de vieille fille. Alors à la quarantaine, n'en parlons pas. -Mais tu reçois tous les jours des mariées d'un âge avancé. Rappelle-toi cette brune qui venait de l'intérieur du pays pour confectionner son trousseau... Elle ne doit pas être bien plus jeune que toi. -Peut-être... Mais ce n'est pas tous les jours que les femmes de mon âge peuvent tomber sur des partis intéressants. Et même lorsque le destin daigne nous sourire, ce n'est pas toujours le prétendant idéal qui se présentera...C'est le plus souvent un veuf, ou un divorcé qui veulent une boniche chez eux ou une nourrisse pour leurs enfants. Maissa garde le silence un moment avant de lancer : -Je ne savais pas que père avait lui-même détruit ton avenir. Il était tellement gentil, tellement ouvert avec moi... Nacéra lève une main protestante : -Que Dieu lui pardonne. Il pensait bien faire. Et puis lorsque tu es née, je devais reprendre le lycée. C'est plutôt cet homme de malheur qui était venu demander ma main pour son fils qui avait tout remis en cause. Jusque-là, personne ne m'avait demandé d'arrêter définitivement mes études. -Mais tu as réussi dans la vie, Nacéra. C'est ce qui compte le plus. Tu ne dépends de personne, et tu es une couturière renommée...J'appellerais bien ça un succès. Tu ne trouves pas ? Nacéra hausse les épaules : -Si on veut. Mais j'avais d'autres rêves... D'autres ambitions... La couture n'était au début qu'une roue de secours, mais ne voilà-t-il pas que j'en ai fais un métier et une carrière. Maissa sourit : -Une grande consolation pour toi... Heu... je ne veux pas te bercer d'illusions, mais je sens que quelqu'un de bien finira par s'intéresser à toi. - Oh ! Je n'y pense même plus... Maintenant, j'aimerais faire autre chose. Peut-être finirais-je par trouver un appartement et m'installer chez moi comme je l'ai toujours voulu. Tiens, pourquoi ne pas réaménager mon atelier ? Je devais m'acheter d'autres machines à coudre et du matériel de couture, mais avec tout ce travail que j'ai sur les bras ces derniers temps, je ferais mieux de reporter ces projets à plus tard. Maissa allait dire quelque chose, puis se ravisa. Nacéra la contemple un moment avant de demander : -Qu'as-tu, Maissa ? Tu ne te sens pas bien ? Maissa secoue la tête : -Non ça va... Je vais bien... Je voulais juste aborder un sujet avec toi. -Bien sûr... Je t'écoute. -Heu... Je... je ne sais par quoi commencer. (À suivre) Y. H.