Au cœur de cette opération, les banques restent très frileuses pour encourager ce type de transaction financière. Un projet de loi relatif au commerce électronique a été adopté, mercredi dernier, par le Conseil des ministres visant à développer l'économie numérique et "à donner une assise légale à cette activité et à instaurer un climat de confiance propre à son extension". Cela permettra-t-il à faire évoluer, pour autant, le recours au paiement électronique dans son ensemble lancé déjà depuis octobre 2016 ? "Certainement pas", soutiennent les spécialités du domaine soutenant que "c'est bien que la loi ait été approuvée par le Conseil des ministres, il va juste falloir qu'elle passe le reste des étapes. Quand on voit le sort qui a été réservé à la mouture de la nouvelle loi sur les télécoms, il a également été adoubé par le CM, mais on en a plus entendu parler". Ali Kahlane, patron de la société Satlinker et expert en télécoms, poursuit : "C'est bien aussi que de la communication de masse ait été lancée pour encourager le citoyen à utiliser la carte de paiement. Mais je pense qu'il faut aussi la lancer d'une manière très pédagogique au niveau des banques mêmes. La majorité estime que l'heure du paiement électronique n'a pas encore sonné et n'est pas concernée." Notre interlocuteur fait état de situations rocambolesques, voire anecdotiques, avec des banquiers qui ne savent même pas ce qu'est un compte e-marchand ou alors refusent catégoriquement de l'accorder. "Cette utilisation est encore bloquée", répondent souvent les banquiers qui, du reste, ont du mal aussi à convaincre leurs clients d'adopter les TPE pour le paiement électronique. Les commerçants, quant à eux, peu enclins à recourir à ce mode de transaction, évoquent l'excuse du réseau pour se soustraire à cette démarche. Force est de constater que la communication fait également défaut devant des citoyens très réticents à tronquer l'espèce en carte magnétique. Cela signifie aussi l'obligation de garder son argent en banque, ce qui est loin de plaire aux Algériens. C'est ce qui explique que l'Algérie enregistre à peine 30% de bancarisation. Ali Kahlane ira même jusqu'à mettre en évidence des choix pour le moins énigmatiques : "Rattacher le numérique au Mptic a été une grosse erreur. Comment peut-on penser raisonnablement promouvoir le numérique, où tout va plus vite que la pensée et où l'instantanéité de l'information et l'immédiateté de l'action régissent l'univers en le confiant à une administration bureaucratique par essence et procédurière par nécessité ?" Iheb Tekkour, expert en Ntic, estime, pour sa part, que "les 100 000 transactions effectuées depuis le lancement du e-paiement restent bien en deçà du potentiel du secteur". C'est dire que la machine est loin d'être huilée, malgré toutes les implications, malgré tous les discours euphoriques et les effets d'annonce. "La valeur ajoutée est importante et non négligeable sur le moyen terme si tous les conditions sont réunies (rapidité de livraison des cartes, amélioration des services d'Internet et d'hébergement des sites, certification électronique des sites, veiller à ce que les TPE ou terminaux de paiement électronique et les GAB ou guichets automatiques bancaires soient toujours opérationnels...)", insiste Iheb Tekkour, qui demeure convaincu que "ce seront les jeunes qui seront eux les porte-drapeaux de cette pratique qui verra les limites du commerce traditionnel, et le temps finira par avoir raison du laxisme des uns et de la mauvaise foi des autres". Nabila SaIdoun