Intervenant hier à l'occasion de la 3e édition de l'université du Forum des chefs d'entreprise (FCE), le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a continué à "plaider" pour le financement non conventionnel, soulignant que le gouvernement qu'il conduit n'a pas fait un choix dans le financement. Mais, qu'il a évité un arrêt cardiaque au pays. Et d'ajouter : "Il y a dans la salle des chefs d'entreprise qui attendent que l'Etat les paye. Celui-ci risquait de ne pas les payer et de ne pas payer ses fonctionnaires. L'intérêt général a été finalement compris au-delà du débat doctrinal et économique." Quelle est la part de ce financement consacrée aux entreprises ? D'abord, en réglant le problème de ses propres dettes publiques, l'Etat va injecter des liquidités dans les banques, a-t-il expliqué. Et cela va permettre de redonner de l'oxygène aux institutions financières, mais également à Sonatrach, à sonelgaz et à l'AADL, entre autres. Sonatrach et Sonelgaz pourront ainsi recouvrer leurs créances et l'AADL lever des crédits. Toujours en défenseur de la planche à billets, Ahmed Ouyahia a sérié les priorités de son gouvernement, mettant l'accent sur l'action économique dont fait partie l'investissement public illustré, selon lui, dans le budget d'équipement de plus de 4 000 milliards de dinars en 2018, en hausse de 1 000 milliards de dinars comparativement à 2017. Ces dépenses publiques comporteront, entre autres, plus de 250 milliards de dinars destinés directement au développement local, ainsi que plus de 260 milliards de dinars destinés à la bonification des taux d'intérêt. Ouyahia a aussi insisté sur le rétablissement de la priorité pour la production nationale dans le cadre de la commande publique, conformément au code des marchés publics en vigueur, ainsi que le recours aux appels d'offres nationaux pour toute réalisation publique. Le recours aux entreprises étrangères deviendra ainsi l'exception, a-t-il insisté. Et l'inflation dans tout cela ? "Nous donnons rendez-vous à nos contradicteurs les premiers trimestres 2018", a-t-il dit. Mohamed Cherif Belmihoub, professeur en économie, dans une de ses déclarations, considère que la démarche gouvernementale est "trop risquée". "Les conséquences immédiates seront : une spirale inflationniste, un effet d'éviction sur le marché du crédit pour les entreprises au profit de la sphère publique, alors que le financement du FNI est une discrimination en défaveur du secteur privé", affirme-t-il. Samir Bellal, également professeur d'économie, considère, lui, que "la création monétaire va enclencher une spirale inflationniste qui va générer des effets ravageurs sur l'ensemble du secteur économique national". Même chose pour Ali Benouari, ex-ministre du Trésor, qui estime que "la planche à billets peut provoquer un chaos à la vénézuélienne en Algérie". "Outre son impact inflationniste, elle provoquera une cascade d'autres effets négatifs, comme une hausse importante du taux de chômage." Toutes ces questions, Ahmed Ouyahia semble les minimiser, qualifiant de "nihilistes" les experts qui les alimentent. Le Premier ministre persiste et signe, affirmant que l'inflation ne sera pas aussi galopante que le disent ces experts. Le pari est pourtant risqué dans un pays qui n'a que les réserves de change comme pare-feu. Youcef Salami