Pour la seule filière céréalière, sur 600 000 agriculteurs, seuls 17 000 accèdent au crédit de campagne. Une situation qui n'est pas faite pour contribuer au développement soutenu de la production agricole. Le ministre de l'Agriculture, du Développement rural et de la Pêche (Madrp), Abdelkader Bouazghi, a révélé, hier, qu'"une grande partie des petits exploitants et d'éleveurs, soit près de 80% des agriculteurs, n'a pas les conditions et garanties d'accès au financement bancaire. Sur 600 000 céréaliculteurs, seuls 17 000 accèdent au crédit de campagne". Leur niveau d'activité demeure proportionnel à leur capacité d'autofinancement, "ce qui, selon le ministre, les exclut de la dynamique de modernisation du secteur". Cette option de modernisation nécessite, reconnaît-il, l'association de l'assurance agricole, outil indispensable d'accompagnement du programme de développement du secteur. Dans son intervention au cours du séminaire international sur l'assurance agricole, organisé hier par la Caisse nationale de mutualité agricole (CNMA), le ministre de l'Agriculture a estimé que ce type d'assurances agricoles implique l'introduction de nouveaux produits adaptés aux conditions climatiques du pays, à savoir la sècheresse récurrente, et aux nouvelles réalités socioéconomiques des agriculteurs. "La police d'assurance devra être conçue pour englober une large gamme de dommages car les pertes engendrées seront considérées comme un manque à gagner par rapport aux résultats que l'agriculteur aurait pu réaliser dans des conditions normales." Les cotisations émises des assurances ont connu, selon le ministre, une nette progression, passant de 5,7 milliards de dinars en 2010 à 12,7 milliards de dinars en 2016, soit une progression de 122%. "Le montant des sinistres déclarés est passé de 3 milliards de dinars en 2010 à près de 7 milliards de dinars en 2016, soit un taux de progression de 130% pour celui des sinistres payés aux sociétaires et usagers assurés", précise M. Bouazghi. Il faut reconnaître également que la culture de l'assurance n'est pas suffisamment développée dans le monde agricole. Le nombre d'agriculteurs qui souscrivent à une police d'assurance au sein de leur institution, en l'occurrence la Caisse nationale de la mutualité agricole (Cnma), reste insignifiant. Par ailleurs, le ministre avoue que la baisse drastique des ressources financières issues de l'exportation des hydrocarbures a contraint l'Etat à revoir sa stratégie et à créer un modèle de croissance nouveau "qui ne repose pas sur le recours quasi exclusif au financement par la dépense publique". Ce modèle laisse, au contraire, indique-t-il, "une place prépondérante à l'investissement privé, national et étranger, dans le cadre de partenariats public-privé et privé-privé". Cette nouvelle vision choisie par M. Bouazghi met en exergue l'émergence d'un "entreprenariat agricole et agroalimentaire d'envergure fondé sur des exploitations agricoles qui auront la taille critique nécessaire pour servir de véritable locomotive aux petites et moyennes exploitations et peser de manière décisive sur la croissance du secteur". Le ministre juge indispensable le développement "plus soutenu" des filières stratégiques, notamment les céréales, le lait, les fourrages, les viandes, les légumes secs. L'idée, explique Abdelkader Bouazghi, c'est de créer une production nationale à même de se substituer de façon durable aux importations massives de certains produits agricoles et alimentaires. Et de construire de ces derniers des filières dédiées à l'exportation qui permettront à notre pays de diversifier ses ressources financières extérieures. Cela passe, affirme-t-il, par la levée de contraintes qui gênent l'investissement privé et le partenariat public-privé et le renforcement du cadre incitatif et d'accompagnement. Il s'agit de mettre à la disposition des porteurs de projets privés de superficies agricoles suivant la taille de leur investissement. Le plan que se fixe M. Bouazghi pour la relance de son secteur traite aussi de la modernisation soutenue des exploitations agricoles et d'élevage par une mécanisation plus large. B. Khris