De l'avis des élus communaux eux-mêmes, le cadre juridique actuel, notamment la loi n°11-10 du 22 juin 2011 relative à la commune, ne consacre toujours pas la "démocratie participative" qui, sous d'autres cieux, contribue d'une manière déterminante à la mobilisation des forces vives de la société en faveur du développement au niveau local. Etant donné les circonstances, cette participation, du reste souhaitée du citoyen, à la gestion des affaires de la commune, "cellule de base de l'Etat", "pierre angulaire" de l'édifice institutionnel, n'est toujours pas à l'ordre du jour. Les pouvoirs publics, qui mettent souvent, par ailleurs, en exergue le "rôle-clé" de la commune dans la gestion des affaires publiques, ne veulent toujours pas lâcher, semble-t-il, le pouvoir décisionnel qui revient, la plupart du temps, et en dernier ressort au wali, commis de l'Etat désigné. N'étant pas à une contradiction près, le discours officiel continue de faire la part belle à "l'initiative locale", alors que l'attentisme reste la seule règle de gestion chez les présidents d'assemblées populaires communales. Et pour cause, les prérogatives considérées comme exorbitantes du wali empêchent toujours les élus locaux de s'émanciper de la tutelle d'une administration réputée envahissante et omnipotente. Difficile dans ces conditions de s'engager dans de véritables programmes de promotion d'activités économiques lorsque l'on sait que l'article 57 de la loi n°11-10 stipule que "ne sont exécutoires qu'après avoir été approuvées par le wali, les délibérations portant sur les budgets et les comptes, l'acceptation de dons et legs étrangers, les conventions de jumelage et les aliénations du patrimoine communal". Last but not least, le wali dispose surtout du "pouvoir de substitution". Ainsi, en vertu de l'article 100 de la loi susmentionnée, le wali peut prendre toutes les mesures relatives au maintien de la sécurité, de la salubrité et de la tranquillité publiques, et à la continuité du service public, notamment, la prise en charge des opérations électorales, le service national et l'état civil. En cas de dysfonctionnement de l'APC, empêchant le vote du budget, le wali peut assurer, à lui seul, son adoption et même son exécution. Enfin, s'il est vrai que la situation actuelle, marquée par une sévère crise économique, exige, au niveau local, un surcroît d'initiatives, il s'agit d'inciter d'abord les institutions publiques à modifier leurs modes d'intervention. Aussi, il n'est sûrement pas nihiliste que d'affirmer que les caractéristiques du pouvoir au niveau local et particulièrement cette mainmise de l'administration sur tous les centres de décision font qu'il est illusoire, dans les conditions actuelles, de voir nos communes s'ériger en centres de développement économique et social. Cette mise sous tutelle s'est, d'ailleurs, tellement renforcée ces dernières années que les cérémonies d'investiture des maires ne consistent plus pour ces "élus" qu'à remettre les clés de leur commune au wali sinon au chef de daïra territorialement compétent. Mohamed-Chérif Lachichi