Si l'Egypte a réussi à conserver son statut d'allié classique durant le premier mandat de George Bush, ce n'est pas le cas avec l'arrivée de Condoleezza Rice à la tête de la diplomatie américaine. Désormais, la médiation de l'Egypte dans le processus de paix entre Israël et la Palestine ne suffit plus pour rester dans les bonnes grâces des Etats-Unis. C'est ainsi que les relations entre les deux pays ont connu un froid. L'affaire d'Ayman Nour, chef du parti libérale Al Ghad, jeté en prison durant six semaines sous prétexte d'avoir falsifié près de 2 000 signatures de soutien à son parti, a été la goutte qui a fait déborder le vase. Washington hausse alors le ton. Mme Rice critique ouvertement la politique égyptienne. Le Caire réplique, pour sa part, par le biais du porte-parole de la présidence égyptienne : “L'Egypte rejette fermement toute ingérence internationale dans ses affaires judiciaires.” Le président américain a demandé, par ailleurs, à l'Egypte “d'être pionnière” en démocratie comme elle l'avait été pour la paix avec Israël. Cependant, la réunion des ministres arabes des Affaires étrangères avec le G8 qui était prévue le 3 mars a été reportée. Cette rencontre était encouragée par les Etats-Unis afin de débattre des réformes politiques au Moyen-Orient. Dès lors, la tension s'est amplifiée entre le Caire et Washington. Condoleezza Rice n'a pas hésité à sauter l'étape égyptienne lors de sa première visite en Israël et dans les territoires palestiniens. Et la guerre de déclarations est montée d'un cran. La polémique s'amplifie, notamment après l'annonce de l'octroi par l'ambassade des Etats-Unis en Egypte d'une subvention de un million de dollars pour 2005 à six associations de la société civile. Pis encore, les USA ont fait circuler des informations selon lesquelles l'Egypte aurait aidé l'Irak à se procurer des armes chimiques sous le régime de Saddam Hussein. Cédant à la pression, Moubarak annonce le 13 mars, devant un aréopage de penseurs arabes représentant à la fois des Etats et des associations de la société civile, qu'il allait présenter de nouveaux projets de réforme politique au Parlement. “La prochaine étape verra s'ouvrir de nouveaux horizons devant la société civile”, a déclaré le chef de l'Etat. Et de souligner que les réformes dans le monde arabe “ne doivent pas venir de l'étranger, mais de l'intérieur, et qu'elles doivent tenir compte des situations inégales entre les pays arabes”. Une réplique qui n'a pas du tout l'air de convaincre la Maison-Blanche qui veut, dans le cadre du projet du Grand Moyen-Orient, amorcer des reformes démocratiques. N. A.