Résumé : Razika est heureuse. Elle est enfin mariée et chez elle, et son mari semble très amoureux. Elle lui avoue que les femmes de sa famille ne voyaient pas en elle une beauté. Maintenant, elle fera des jalouses. Mohamed rit encore. -Je préfère mieux ça. Ainsi on va reconsidérer ton cas. Razika sourit. -Oui, mon mari. Je veux dire oui, Mohamed. Cela est inévitable. On ira même jusqu'à me dire que peut-être je t'ai ensorcelé. Mohamed reprend son air sérieux. -C'est un peu le cas. -Hein ? -Maintenant que tu es mon épouse devant Dieu et les hommes, je vais t'avouer que tu me rappelles une femme qui a beaucoup compté pour moi. -Tu avais déjà une femme ? -Non. Pas comme tu l'entends. Cette femme, je l'ai rencontrée lors de mon périple vers la grande ville. Elle s'appelle Louisa. Une belle brune avec des yeux verts comme les tiens. Razika retient son souffle. Elle n'avait jamais entendu parler d'une histoire d'amour. Et Mohamed l'avait surprise en lui confiant son secret. Ce dernier continue sur sa lancée pour lui raconter toute l'histoire. À la fin, ils gardèrent le silence un moment, puis le jeune homme regarde sa femme en face et lui dit : -Je veux que tu saches une chose, Razika. Cette femme a certes compté pour moi. Elle m'a aimé, et durant de longues années, elle n'a cessé de hanter mes nuits. Mais à partir du moment où je t'ai vue, Louisa n'est plus et ne sera plus qu'un souvenir. Désormais, tu seras mon seul amour, et la femme avec qui j'aimerais vivre longtemps, très longtemps. La jeune mariée, émue par autant de sincérité, se met à pleurer. L'histoire que venait de lui raconter son mari l'avait touchée au plus profond d'elle-même. Mohamed la prend dans ses bras et se met à la bercer. -Tu seras toujours la seule femme de ma vie, Razika. Des années passent. Le jeune couple avait vécu heureux, et trois enfants étaient venus embellir leur union et leur vie. Deux garçons, qu'on prénomma Idir et Lounis, et une fille, à qui on donnera le prénom Zahra. Mais Mohamed voulait d'autres enfants. En quatrième position, et après un temps d'attente assez long, viendra au monde un certain mois de septembre 1903, Yasmina. 1903 – Ma grand-mère Yasmina C'était une fille robuste, qui poussera son premier cri au milieu d'une chambre qui donnait sur la courette intérieure, et dont la fenêtre débordait de jasmin. Les effluves de cette plante embaumaient les lieux. Mon arrière-grand-mère n'ira pas chercher trop loin pour prénommer sa propre fille Yasmina. Yasmina était le portrait craché de sa mère, avec cependant un charme plus ravageur. Son air intelligent n'échappa à personne, et son sourire gai en réconfortait plus d'un. À six ans, elle était déjà une grande fille curieuse et ouverte à tout, et à 8 ans, découvrant qu'une école venait d'ouvrir ses portes dans le quartier, elle n'hésita pas à s'y rendre pour apprendre à lire et à écrire. Un jour, apprenant que sa fille allait à l'école, Mohamed entra dans une grande colère et lui interdira de franchir le seuil du portail de la maison sans sa propre autorisation. Mais c'était compter sans l'espièglerie de Yasmina qui, sous prétexte de se rendre chez des voisines de son âge pour apprendre la couture, se faufilait entre les petites ruelles du quartier pour atterrir dans son école. C'est ainsi qu'à l'âge de 12 ans, tout le quartier savait que Yasmina lisait et écrivait sans difficulté, sauf son propre père. (À SUIVRE) Y. H.