Le conflit entre le ministère de l'Education et le syndicat Cnapeste en grève illimitée prend une tournure surprenante tout en dévoilant ce qui semble, pour le moins, une indigence du gouvernement en matière de communication et de dialogue. Pour preuve, les ministres, au même titre que des élus de la majorité parlementaire, ont préféré se tenir à distance de cette crise, fermant, de fait, les canaux de dialogue pour se faire substituer par des personnes non seulement non habilitées, mais aussi toutes étrangères au secteur que marquées. Une "intrusion" qui sous-tend le risque ou l'intention de manipulation. Les réseaux sociaux ne l'ont d'ailleurs pas manqué. En effet, le recours direct ou indirect aux services de deux religieux dont un Ali Aya connu dans les milieux islamistes, pour son appartenance au Fis dissous, entre autres, et un avocat connu sur la place d'Alger pour être le défenseur du ministère de la Communication, dénote de l'incapacité ou du manque de volonté des institutions à trouver une issue à l'impasse. La sollicitation abusive de la justice n'a pas eu d'effet dissuasif sur les décisions de débrayage. Depuis des années, plusieurs conflits ont été réglés par le dialogue, y compris ceux de l'éducation nationale. Idem pour les autres secteurs qui ont connu des perturbations mais ont eu droit cependant à l'attention et à l'intérêt des membres du gouvernement et d'autres institutions pour éloigner, à chaque fois, le spectre du pourrissement. Avec le Cnapeste, en grève depuis janvier, les choses ont évolué autrement, avec deux camps campant sur leurs positions. Des ministres, celui du Travail, puis celui de l'Intérieur, prendront un instant le relais de Benghabrit, laissée, encore une fois, seule depuis le début du mouvement, ensuite cette majorité parlementaire, qui sort de sa torpeur, pas pour contribuer à trouver une solution, mais pour demander au gouvernement de ne pas céder, une position, paradoxalement, enrobée dans le programme du Président. Une posture des plus hallucinantes pour un Parlement censé suivre de près les événements. Et au moment où Saïd Bouhadja, président de l'Assemblée nationale, renvoie la balle au ministère de l'Education et aux instances habilitées à dialoguer avec le syndicat, se désengageant de son droit et de son devoir d'interpeller tout au moins la ministre, intervient l'intrusion de cet imam, Ali Aya, pour offrir ses services comme médiateur entre les deux parties en conflit. Benghabrit, qui l'a reçu, se défend, dans un entretien au site TSA, arguant qu'elle reçoit tout le monde. Sauf qu'il s'agit d'un étranger au secteur, d'une part, et que son passé plaide pour qu'il en soit éloigné. Comme si l'Etat ne disposait ni de personnel capable de dialogue ni de canaux. Ainsi à défaut de véritable dialogue serein, on fait appel à de tierces parties pour mener cette délicate mission. À moins que cela ne soit une initiative de l'éducation ou d'autres institutions, afin de donner plus d'effets à l'entreprise de diabolisation du syndicat qui a déjà fait du chemin. Déjà qu'on a réussi, en partie, à éloigner cette crise en mettant face à face les enseignants grévistes et les parents d'élèves. Maintenant, on pousse plus loin en mettant en avant le controversé imam pour accoler l'étiquette d'islamiste radical au Cnapeste. Ce qui démontre qu'il n'y a pas une véritable volonté politique pour désamorcer la situation. D'où, certainement, l'appel du syndicat à l'intervention du président de la République et à la médiation du ministre du Travail. Et c'est le syndicat, lui-même acculé et sous pression, qui essaie de trouver les canaux du dialogue. Djilali B.