L'Algérie fait partie de la trentaine de pays africains qui n'ont pas encore de loi sur la protection des données personnelles ni d'autorité qui veille à son application, contrairement à 20 autres nations qui ont déjà mis en place une législation, dont 8 ont également installé une autorité compétente en charge de ce dossier. La Tunisie et le Maroc font partie de ces pays qui ont pris de l'avance dans ce domaine, la première depuis 2007 avec l'installation de l'Instance nationale de protection des données personnelles et le second grâce à la Commission nationale des données personnelles, mise en place en 2009. "En Algérie, la cybersécurité est traitée sous l'angle de la lutte contre la cybercriminalité et non pas de la protection des données", a expliqué, jeudi dernier, Nacima Lamalchi-Elkilani, avocate en propriété intellectuelle et industrielle et dirigeante de DataCompliance Afrique, société dédiée à l'accompagnement des entreprises en Afrique, en particulier au Maghreb, dans la mise et le maintien en conformité à la nouvelle réglementation européenne en matière de protection des données personnelles. À l'occasion du 6e Sommet sur la cybersécurité, l'experte avait donné une conférence sur l'impact du Règlement général de la protection des données personnelles (RGPD) sur les sociétés africaines, en expliquant que ses effets sur le continent sont inévitables et que l'Afrique ne pouvait échapper à une "adhésion" à cette nouvelle loi qui doit entrer en vigueur le 25 mai prochain. Le RGPD, qui prévoit de nouvelles dispositions relatives à la protection des personnes physiques et leurs données personnelles, présente des enjeux importants pour les pays africains en ce sens que des responsables de traitement et sous-traitants établis hors de l'UE (qui manipulent des données de personnes se trouvant sur le territoire européen) seront tenus de se plier à de nouvelles règles très strictes et très contraignantes. Entre autres, la nouvelle loi interdit aux entreprises européennes d'envoyer des données personnelles en Afrique, ou ailleurs, tant que les organismes destinataires n'auront pas donné de garanties de protection et de sécurisation des données, selon les standards qu'elle aura fixés et certifiés. En l'occurrence, étant entendu que l'Algérie, comme de nombreux autres pays, est encore vulnérable en termes de cybersécurité et de protection de données, il est à craindre que de graves perturbations ne viennent compromettre davantage son économie à partir de l'été prochain. La très grande majorité des entreprises algériennes, y compris celles qui traitent avec des partenaires de l'UE, étant encore très loin de garantir un niveau de sécurité élevé des données — certaines commençant juste à prendre conscience de l'importance de la cyber-sécurité —, on pourrait assister à une dégradation des relations avec les partenaires de l'UE. Du reste, on ne peut pas dire non plus que l'Etat ait fait preuve d'"alacrité", le Parlement venant à peine d'adopter un projet de loi relatif à la protection des données personnelles. Il faut signaler que les entreprises européennes, qui ne se seront pas mis en conformité avec les dispositions du RGPD le 25 mai prochain, risquent, elles-aussi, de très lourdes sanctions, notamment financières : 10 à 20 millions d'euros ou de 2% à 4% du chiffre d'affaires. S. Ould Ali