Décidément, les Français n'arrivent pas à se déterminer quant à la position à adopter vis-à-vis du projet de Constitution européenne. La montée en puissance du oui semble s'être estompée à voir la remontée du non dans les sondages depuis quelques jours. Le dernier en date, de l'institut Ifop, donne à nouveau l'avantage à l'anti-Constitution. Ce sondage, réalisé juste avant le week-end auprès de 858 électeurs inscrits et publié samedi dernier sur le site Internet Wanadoo, donne le non nettement victorieux avec 54% des suffrages exprimés, contre 46% pour le oui. Ainsi, après avoir perdu du terrain durant plusieurs semaines, les partisans du non reviennent à la charge et mettent un terme à la montée du oui qui avait atteint les 52%, selon le sondage TNS-Sofres réalisé les 9 et 10 mai derniers. Ce renversement de situation est dû, selon les observateurs, aux nouveaux sympathisants de gauche. Pourtant, à droite comme à gauche, les partisans du oui n'ont pas ménagé leur peine ces dernières semaines, de meetings en interventions médiatiques, dont une deuxième intervention télévisée du président Jacques Chirac et une interview, également télévisée et très remarquée, de l'ancien Premier ministre socialiste Lionel Jospin, le 28 avril. Tous les thèmes touchant à l'Europe ont été exploités, du succès technologique de l'Airbus A380 aux annonces sans doute un peu précipitées d'un compromis avec le Japon sur l'implantation du réacteur thermonucléaire expérimental Iter à Cadarache, dans le Sud de la France, ou d'un accord imminent des 25 de l'UE sur la réduction de la TVA dans la restauration. Un panel de personnalités européennes de tous bords sont venus en France prêter main-forte au camp du oui. Mais, il a suffi que l'ancien président de la Commission européenne, Jacques Delors, mette son grain de sel en évoquant un éventuel plan B en cas de non au référendum, dans un entretien accordé au quotidien Le Monde, pour que le message des partisans du oui se brouille. Cette controverse a remis sur les rails le non en dépit de la tentative de Jacques Delors de se racheter en niant l'existence d'un plan B. “Il n'y a pas de plan B, ni dans les têtes ni dans les dossiers”, a-t-il insisté en vain, vendredi dernier, lors de son passage sur un plateau de télévision. Frédéric Micheau, directeur d'études au département Opinion publique Ifop, estime que l'une des raisons du nouveau changement de tendance dans les sondages n'en réside pas moins dans le retour médiatique marqué de Laurent Fabius, “identifié comme le principal leader du camp du non”, avec des “prises de parole fortes contre le projet de Constitution”. “Les suspicions de manipulation médiatique profitent au non”, estime également le responsable de l'Ifop, pour qui la polémique sur la suppression du lundi férié de Pentecôte génère d'autre part “un mouvement de mécontentement social qui trouve un débouché naturel dans le vote non”. Il ne fait aucun doute que les dix prochains jours précédent le scrutin référendaire constitueront la dernière ligne droite de la course-poursuite à laquelle se livrent les partisans de la Constitution européenne et ceux qui la rejettent. K. A.