“Impossible de laisser passer ça !”, s'exclament les politiques lorsqu'ils participent à des débats houleux et que des propos jugés inacceptables sont proférés. À notre tour, nous disons qu'il est impossible de laisser passer sans réagir cette annonce publicitaire, qui défile ces jours-ci, et qui est censée vanter les mérites d'une marque de voiture : elle rassemble en elle, incompétence, bêtise et, de plus, elle est déloyale. Résumons vite cette “pub” : Il s'agit d'un dialogue entre deux jeunes, A. et B. - A. : Salut B., où vas-tu ? - B. : Je vais en ville pour me faire un film. - A. : Laisse tomber, il n'y a rien (makane wallou). Je t'invite dans ma bagnole et tu pourras voir un film à l'aise. - B. : J'arrive, merci ! Cette réclame nous interpelle et nous attriste à plus d'un titre. Tout d'abord dans son fond : - Comment peut-on vouloir attirer le client et comment peut-on vouloir vendre un véhicule en proposant uniquement de visionner une minable bande vidéo sur un minuscule écran TV ? Pourtant, les “bagnoles”, si chères aujourd'hui, possèdent d'autres arguments… Comme aurait dit un ami : “Ces sacrés engins ont des attributs percutants !” Ensuite dans sa forme : - Comment supporter ce parler algérois à l'accent si exagéré qu'il frise le vulgaire et le grossier ? À entendre ce jargon, notre ami Abdelmadjid Meskoud en serait certainement outré ! Enfin, cette “pub” nous interpelle quant à son contexte : - Comment adhérer à un spot publicitaire anti-cinéma, anti-jeunes, diffusé à longueur de journée sur les ondes de la radio, au moment où quelques cinéastes, réalisateurs, distributeurs, courageux et persévérants, déploient des efforts inouïs pour placer quelques films, des vrais ceux-là, dans les quelques rares salles de cinéma qui fonctionnent encore et, qui plus est, sans l'aide de quiconque ? Comment penser encore à enfermer nos jeunes dans un espace réduit, eux qui aiment tant sortir en bandes, filles et garçons mêlés, dans les lieux publics, lieux de vie ? Le concepteur de cette annonce veut-il donner le coup de grâce à notre cinéma ? Heureusement qu'il y a Yacine qui nous sauve à chaque fois que nous sommes tristes et perdus ! C'est pourquoi nous le citons aujourd'hui, mais uniquement dans la forme, en reprenant ce qu'il affirme avec brio : “La fatalité de la femme c'est sa beauté.” À sa suite, nous nous interrogerons en posant la question : la fatalité de la publicité n'est-elle pas sa débilité ? B. K.