Bush évoque à peine l'Iran, mais le tonitruant Sarkozy s'autoproclame «gendarme» du nucléaire dans le monde. Très attendue, la confrontation «indirecte» Bush-Ahmadinejad n'a finalement pas eu lieu. Le président américain, George W.Bush, deuxième orateur à la tribune de l'Assemblée générale des Nations unies, après le discours du président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva -le Brésil ouvre traditionnellement les assemblées de l'ONU depuis 1945- avait à peine évoqué, mardi, l'Iran concentrant son discours sur les droits de l'homme et les libertés, annonçant au passage de nouvelles sanctions américaines contre le Myanmar (Birmanie) où la révolte des moines boucle sa première semaine et ce, aux fins «d'aider le mouvement de protestation» et faire pression sur la junte militaire au pouvoir à Rangoon. «Les Etats-Unis vont renforcer leurs sanctions économiques contre les dirigeants du régime et ceux qui les soutiennent financièrement», a déclaré M.Bush devant 192 chefs d'Etat ou de gouvernement réunis en assemblée. Le président américain a ainsi feint d'ignorer l'Iran y faisant à peine allusion. Si George W.Bush s'est montré peu disert sur le cas iranien, il n'en a pas été de même pour son homologue français, le tonitruant Nicolas Sarkozy -à l'évidence désireux de marquer les esprits- qui siège pour la première fois en si illustre compagnie. C'est devant un Ahmadinejad impassible que le président Sarkozy s'est livré à une attaque en règle du nucléaire iranien et de la velléité de Téhéran à se doter de l'arme nucléaire, ce qui reviendrait, selon le président français, à faire «courir un risque inacceptable à la stabilité de la région et du monde». Le président français a également affirmé qu'il n'y aura «pas de paix dans le monde si la communauté internationale (entendre l'Occident) fait preuve de faiblesse face à la prolifération des armements nucléaires» «L'Iran a droit à l'énergie nucléaire à des fins civiles, a-t-il ainsi affirmé, mais (en laissant l'Iran) se doter de l'arme nucléaire, nous ferions courir un risque inacceptable à la stabilité de la région et du monde», et Nicolas Sarkozy d'ajouter: «Tous les experts de toutes les parties du monde sont d'accord pour dire que (les Iraniens) travaillent sur l'arme nucléaire militaire». D'où M.Sarkozy a-t-il donc pu sortir cette affirmation quand l'Aiea (Agence de sûreté nucléaire de l'ONU) après plusieurs années d'enquête reste prudente et insiste sur le fait qu'elle n'a rien découvert qui puisse conforter les soupçons de l'Occident sur un programme nucléaire militaire iranien? Prenant la parole à son tour, le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, peu affecté par ces attaques, se livre à un véritable réquisitoire contre les Etats-Unis. Tout y passe: l'Irak, l'Afghanistan, Guantanamo Bay, les prisons secrètes de la CIA, les tortures contre de présumés terroristes, la peine de mort et les exécutions des condamnés aux USA...Sans citer nommément les Etats-Unis, le président iranien souligne: «Malheureusement, les droits de l'homme sont violés quotidiennement par certaines puissances, surtout par celles qui prétendent être leurs seuls avocats.» Un tableau très sévère des pratiques américaines est ainsi mis en lumière, pratique que Washington noie sous un déluge de discours sur les droits de l'homme et sur les libertés alors que ceux-ci sont quotidiennement violés aux Etats-Unis où la ségrégation continue de sévir et où les inégalités entre les ethnies perdurent. Ahmadinejad qui a ainsi présenté un état des lieux peu amène des Etats-Unis, a en revanche déclaré du haut de la tribune des Nations unies que la question du nucléaire iranien «est officiellement close», indiquant: «J'annonce officiellement que, selon nous, la question nucléaire est désormais close et qu'elle est devenue une question ordinaire relevant de l'Agence» internationale de l'énergie atomique (Aiea), a déclaré M.Ahmadinejad, allusion à la prochaine rencontre entre les experts de l'agence onusienne et ceux de l'Iran sur le cas controversé de l'enrichissement de l'uranium. A ce propos et réagissant aux menaces de représailles militaires contre l'Iran proférées par des responsables américains et récemment français, le président Ahmadinejad a affirmé que son pays ne tiendrait pas compte des «diktats illégitimes et politiquement motivés des puissances arrogantes». En réalité, le programme nucléaire iranien est devenu un cas d'école dans le sens où les grandes puissances détentrices de ce vecteur de développement prétendent en être les seules gardiennes et interdisent l'accès au nucléaire et à sa maîtrise à tout pays qui ne se soumet pas à leur diktat. Dans cette optique, l'actuel combat de l'Iran pour son droit au nucléaire est celui de tous les pays tiers longtemps laissés-pour-compte par les pays industrialisés.