"C'est un événement inédit dans d'autres pays qui dessinera un grand signe de fraternité dans le ciel algérien à destination du monde entier", a souligné le pape François, dans son message, envoyé à l'occasion de cette cérémonie. Durant toute la journée d'hier, Oran a été au cœur de cérémonies officielles qui se sont succédé en différents lieux, marquant la béatification de 19 religieux catholiques, conjuguée à un hommage aux 114 imams, tous assassinés durant la décennie noire. Empreintes de dignité et d'émotion, ces manifestations ont rassemblé de nombreux présents, 1 300 invités dont 500 étrangers. Parmi eux, de nombreux religieux de l'Eglise catholique d'Algérie, entourant le cardinal Giovanni Angelo Becciu, préfet de la Congrégation des causes des saints représentant du Pape à cette cérémonie, le secrétaire d'Etat français aux Affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne, ainsi que le corps diplomatique, à savoir les ambassadeurs de Pologne, d'Espagne, de France et les consuls. Le ministre des Affaires religieuses, Mohamed Aïssa, côté algérien, était accompagné des autorités locales, des élus et d'imams d'Oran. Mais ce fut chez les familles des 19 religieux catholiques assassinés dans les années 90, ayant fait le déplacement, certains pour la première fois, que l'émotion fut grande. De même pour les familles et les proches des imams, qui ont été également invitées à participer à cet événement qui revêtira un caractère religieux, musulman et catholique. La mosquée Ben Badis d'Oran a permis à cette occasion, après la lecture de la sourate "Meriem", la réunion du cardinal, du ministre et des imams avec des prises de parole au sein de la grande salle de prière. Les maîtres-mots des interventions auront été ceux de la paix, de la concorde et du vivre-ensemble. Le ministre des Affaires religieuses en profitera pour souligner que la concorde a permis de "refermer les plaies". "Nous tournons la page, mais sans oublier", assure-t-il. Et d'ajouter : "Nous nous orientons vers l'avenir. Et nous œuvrons pour que notre société soit une société de paix, de réconciliation et du vrai vivre-ensemble." À son tour, le cardinal Giovanni Angelo Becciu aura le même espoir pour "collaborer ensemble pour une société juste basée sur la paix et le respect de l'autre". Puis, le représentant papal aura des mots pour le sacrifice des 19 religieux catholiques et des114 imams. "La cérémonie d'aujourd'hui est pour ceux qui ont donné leur vie en signe d'amitié pour votre pays. Ils ont réuni leur sang avec les imams et d'autres citoyens qui ont perdu leur vie dans l'accomplissement de leur devoir pour votre grand pays." Les familles des religieux et religieuses catholiques présentes à la mosquée et à l'esplanade de Notre-Dame de Santa Cruz feront part aussi de leur appréhension, au départ, à venir pour cet événement et de leur interrogerrogation sur le sentiment algérien. De tous ceux que nous avons rencontrés au final, tous feront part de l'absence de haine, de ressentiment et suivant la vie de leur proche réitèrent aussi les messages de paix et de concorde. L'émotion était aussi chez la mère, le frère et la sœur de Mohamed Bouchikhi, le chauffeur de l'évêque Pierre Claverie, qui perdit la vie à ses côtés, dans un attentat perpétré en août 1996, et qui est souvent oublié, malheureusement, comme victime du terrorisme. Dans l'après-midi, le cardinal présidera la cérémonie de béatification des 19 religieux catholiques avec des messes et des chants liturgiques, en plein air sur l'esplanade du Vivre-ensemble à Notre-Dame de Santa Cruz, et cela, en présence de la délégation officielle algérienne, ainsi que des imams présents. Il sera fait lecture du message du pape qui remerciera l'Algérie d'avoir permis et facilité la célébration de la béatification. "C'est un événement inédit dans d'autres pays qui dessinera un grand signe de fraternité dans le ciel algérien à destination du monde entier", a souligné le souverain pontife dans son message et qui espère que "cette célébration aide à panser les blessures du passé et crée une dynamique nouvelle de la rencontre et du vivre-ensemble". D. LOUKIL