Le gouverneur de la Banque d'Algérie a laissé entendre que la planche à billets ne risque pas de s'arrêter, du moins pour le moment, les équilibres financiers étant difficiles à atteindre avec le prix actuel du pétrole. Le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Loukal, a tenté, avant-hier, de rassurer sur la gestion du mécanisme de financement non conventionnel. Répondant aux préoccupations soulevées par les députés, lors des débats qui ont suivi la présentation du rapport de la Banque d'Algérie sur les évolutions financières et monétaires du pays au titre de l'exercice 2017 et des neuf premiers mois de l'année en cours, M. Loukal a soutenu que cette gestion "était assurée jusque-là avec succès" en dépit des risques liés notamment aux pressions inflationnistes. Il a évoqué la politique monétaire mise en œuvre par la Banque d'Algérie, à travers l'utilisation des instruments adéquats, notamment la reprise de liquidité et la réserve obligatoire, pour la gestion de la liquidité. L'utilisation appropriée de ces instruments devrait permettre de stériliser l'excédent de liquidité induit par le programme de financement monétaire. Le gouverneur de la Banque d'Algérie soutient que cette politique monétaire a permis de maîtriser l'inflation, dont le taux est passé de 5,4% avant la mise en œuvre du financement non conventionnel à 3,5%. L'évolution des prix à la consommation en rythme annuel a été de 4,5% jusqu'à novembre dernier, a indiqué, hier, l'Office national des statistiques. M. Loukal a ajouté que le Trésor public tire de l'argent de son compte à la Banque d'Algérie en fonction de ses besoins. Le mécanisme de financement non conventionnel est essentiellement utilisé pour le rachat de la dette de Sonelgaz, l'achat des titres du Trésor détenus par Sonatrach, le paiement de l'emprunt national et le renflouement du Fonds national d'investissement. Le solde du Trésor s'est élevé à 1 475 milliards de dinars à fin octobre, a fait savoir le gouverneur de la Banque d'Algérie, laissant entendre que la planche à billets ne risque pas de s'arrêter, du moins pour le moment. Les équilibres financiers seront difficiles à atteindre avec le prix actuel du pétrole. Financement non conventionnel : aucun plafond n'a été fixé M. Loukal a rappelé que la loi régissant l'opération a limité la période de son utilisation à 5 ans, soit jusqu'à 2022. Cependant, aucun plafond n'a été fixé pour laisser au gouvernement une marge de manœuvre lui permettant de recourir à ce mode de financement selon les données financières et économiques. Si le gouverneur a fait montre d'une certaine transparence en relevant avec détails l'usage des montants mobilisés dans le cadre du financement non conventionnel, il n'a pas fait référence aux réformes structurelles qui devaient accompagner le recours à ce financement monétaire. Pour rappel, le gouvernement a, par un décret exécutif publié au Journal officiel n°15 du 7 mars dernier, fixé "le mécanisme de suivi des mesures et des réformes structurelles économiques, financières et budgétaires visant à rétablir, au plus tard, dans un délai de cinq ans, à compter du 1er janvier 2018, les équilibres de la trésorerie de l'Etat et de la balance des paiements". La Banque d'Algérie, en qualité de pourvoyeur de financement monétaire au profit du Trésor, est chargée d'assurer le suivi et l'évaluation de l'exécution des réformes structurelles économiques, financières et budgétaires. Si la planche à billets carbure à plein régime, les réformes patinent. Tous les pays pétroliers touchés par la crise ont ajusté leur économie. À ce rythme, l'ajustement en Algérie risque d'être brutal. Evoquant l'opération de rafraîchissement des billets de banque et des pièces de monnaie, M. Loukal a annoncé la mise en circulation de nouvelles coupures de 1 000 DA et de 500 DA et une nouvelle pièce de 100 DA. "C'est une opération classique", a-t-il indiqué, soulignant que "le changement de monnaie n'est pas inscrit dans le programme de la Banque d'Algérie". Le gouverneur de la Banque d'Algérie a également informé que le règlement relatif aux conditions d'exercice, par les banques et les établissements financiers, des opérations bancaires relevant de la "finance participative" portant sur les produits financiers conformes à la charia sera bientôt publié au Journal officiel. M. Loukal a indiqué que le montant des créances non performantes est estimé à 1 127 milliards de dinars à fin 2017, dont 192 milliards sont des crédits octroyés dans le cadre du dispositif Ansej. Concernant le marché parallèle du change, le gouverneur de la Banque d'Algérie a estimé que le traitement de ce phénomène passe par le traitement du problème de l'économie informelle. M. Loukal a écarté l'octroi de nouveaux agréments pour l'ouverture des bureaux de change. "Ce n'est pas à l'ordre du jour", a-t-il lancé, rappelant que la Banque d'Algérie avait auparavant octroyé des agréments à 46 bureaux de change privés, mais ces derniers avaient suspendu leurs activités pour défaut de rentabilité. Meziane Rabhi