Le retrait américain de Syrie a provoqué un bouleversement géopolitique inattendu dans la région du Proche-Orient. Cela œuvre évidemment en faveur de Bachar al-Assad, dont le départ du pouvoir ne semble plus être une priorité des capitales occidentales. La Russie et la Turquie ont convenu hier, au cours de pourparlers à Moscou, de "coordonner" leurs actions sur le terrain en Syrie dans le contexte du retrait annoncé des forces américaines, décidé par l'imprévisible président des Etats-Unis, Donald Trump, la semaine dernière. "Nous sommes tombés d'accord sur le fait que les représentants militaires russes et turcs sur le terrain vont continuer de coordonner leurs actions dans ce nouveau contexte avec pour but d'éradiquer la menace terroriste en Syrie", a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, à l'issue de discussions avec une délégation turque. "Nous avons discuté de la manière dont nous allons coordonner notre travail en commun dans le contexte" du départ des Américains, a confirmé son homologue turc Mevlüt Cavusoglu. M. Lavrov s'est dit "optimiste" après ces discussions qui ont notamment impliqué M. Cavusoglu, les ministres de la Défense des deux pays, Hulusi Akar et Sergueï Choïgou, et des responsables du renseignement. Ces pourparlers interviennent après l'annonce la semaine dernière par le président Donald Trump du retrait des militaires américains de Syrie, faussant le calcul de tout le monde, y compris au sein de alliés de Washington et membres de la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis. Avant même d'être appliquée, cette décision entraîne des revirements d'alliances, illustrés par l'entrée hier de l'armée de Bachar al-Assad dans la région de Minbej, dans le nord de la Syrie, en réponse à un appel à l'aide des forces kurdes. La Russie est avec l'Iran le principal allié de Damas, tandis que la Turquie est un soutien majeur de l'opposition armée dite modérée et même de certains groupes terroristes liés à Al-Qaïda et à Daech. Les trois pays sont les garants du processus de paix d'Astana, mis en œuvre en janvier 2017 sans l'implication de Washington et qui a progressivement éclipsé les négociations sous l'égide de l'ONU. "Comme par le passé, nous allons poursuivre le travail actif et la coordination avec nos collègues russes et iraniens pour accélérer le règlement politique en Syrie", a assuré M. Cavusoglu, dont le pays est accusé ouvertement par Damas de violer la souveraineté territoriale de la Syrie. La Russie et la Turquie ont également promis de coopérer pour favoriser le retour des réfugiés syriens dans leurs foyers et de leur fournir une aide humanitaire, ainsi que de poursuivre le travail en vue de la création d'une zone démilitarisée à Idleb, le dernier bastion de l'opposition et des groupes terroristes en Syrie. Un sommet sur la Syrie réunissant les présidents russe Vladimir Poutine, turc Recep Tayyip Erdogan et iranien Hassan Rohani est prévu pour début 2019, selon Moscou. R. I./Agences