Le projet de loi relatif à la lutte contre la corruption a été présenté, hier, devant les députés par le ministre de la Justice, garde des Sceaux. Selon le rapport préliminaire de la commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l'APN, ce projet de loi s'articule autour de quatre grands axes. Il s'agit d'abord d'adapter la loi n°06-01 du 20 février 2006 aux dispositions de la Constitution révisée en 2016, dont l'article 202 qui stipule la création d'un organe national de prévention et de lutte contre la corruption, en tant qu'autorité administrative indépendante, chargé, selon l'article 203, de proposer une politique globale de prévention contre la corruption. Il est, également, question de la création d'un pôle pénal financier à compétence nationale, auprès de la cour d'Alger, lequel pôle sera chargé de la recherche, de l'enquête, du suivi et de l'investigation sur les crimes financiers complexes, les crimes liés à la corruption, à la fraude et à l'évasion fiscale, au financement des associations et les crimes liés au change et aux établissements financiers et bancaires. Ce pôle pénal financier héritera, dès son installation, de toutes les procédures pendantes devant l'Office central de répression de la corruption. Le pôle peut intervenir d'office pour les infractions entrant dans sa compétence dont il prend connaissance ou dont il est informé par les administrations, institutions et établissements ainsi que par toute autre personne. Selon l'article 24 bis 2 du projet de loi, "le procureur de la République près le tribunal du lieu de l'infraction ou de la juridiction à compétence étendue se dessaisit de la procédure, lorsqu'elle est revendiquée par le procureur de la République auprès du pôle pénal financier. En cas de saisine du pôle pénal financier, les officiers de police judiciaire exerçant dans le ressort du tribunal du lieu de l'infraction, reçoivent les instructions directement du procureur de la République près du pôle pénal financier". Le projet de loi introduit également le principe de la protection légale des dénonciateurs et des lanceurs d'alerte quant aux affaires de corruption. Il est aussi attendu la création d'une agence nationale de gestion des avoirs issus des biens saisis, gelés ou confisqués, dans le cadre de la lutte contre la corruption. Lors de son intervention devant les députés, le ministre a indiqué que ce texte, complémentaire à la loi de 2006, a pour objectif de conforter les missions de l'organe national de prévention et de lutte contre la corruption. Il a rappelé, à l'occasion, que l'Algérie est "un des premiers pays à avoir ratifié la convention de lutte contre la corruption en 2004", en ajoutant que le texte est conforme aux conventions internationales ratifiées par l'Algérie, notamment la Convention des Nations unies contre la corruption (CNUCC). Il a saisi cette occasion pour s'attaquer aux ONG qui, régulièrement, classent l'Algérie aux dernières places en matière de corruption, en précisant que "l'Algérie se soumet à un mécanisme onusien qui évalue les pays en la matière (lutte contre la corruption)" et "s'appuie sur les organisations officielles et non sur les organisations non gouvernementales pour l'élaboration des rapports de lutte contre la corruption". D'ailleurs, certains observateurs estiment que la programmation de ce projet de loi pour adoption est liée à la prochaine venue des experts des Nations unies "pour évaluer l'Algérie par rapport à l'application de la Convention contre la corruption."