La librairie "l'Arbre à Dires" (Alger) a abrité, samedi dernier, une rencontre-débat avec l'écrivain et journaliste Mustapha Benfodil, animée par l'éditrice Selma Hellal, des éditions Barzakh. L'éternel adolescent au regard timide est revenu sur la création de son dernier roman Body writing (éditions Barzakh, 2018), les thèmes qui le traversent, la part autobiographique qui se niche tout au long de ces lignes et l'engagement de l'auteur, patent celui-ci, à travers le personnage principal. Dans son discours, qu'il a accompagné d'une sorte de performance où bouts de papiers, carnets, emballages de chocolats, étalés à même le sol, intriguaient autant l'assistance que le cheminement de cet écrit qui voit le jour 7 années après son dernier roman, Archéologie du (chaos) amoureux (Barzakh, 2011). À propos de cette absence de la scène littéraire justement, il explique : "J'ai senti le creux qui m'a séparé de mon lectorat algérien. Ce contact est important pour moi, cette solitude était un fait très étrange. Notre métier (d'écrivain, ndlr) nous oblige à être assigné à "résistance", et le moindre silence, faute éthique, se paye." Ces bouts de papiers présentés au début de la rencontre justement sont le même matériau que découvre, au fil des pages, la femme du personnage principal de son nouveau roman, Karim Fatimi. Se pose alors la question de la part d'autobiographie : Benfodil s'est-il inspiré délibérément de son propre vécu, où est-ce une stratégie discursive pour brouiller les pistes ? À cela, il répond : "L'écriture de ce livre comporte trois modalités, certes, il y a une part d'autobiographie, mais je ne saurais dire à quel pourcentage. Pour octobre 1988 par exemple, j'ai été témoin de ces évènements, mais je les avais consignés. Je n'avais pas prévu de traiter de cela, c'était une façon de recouvrer la dignité de cette partie de notre histoire." Parlant de son écriture, où se rencontrent langue soutenue, argot, derdja, kabyle et même anglais, le journaliste dira que chaque artiste organise son œuvre d'une certaine manière. Et de poursuivre : "J'essaye de régler l'équation formelle qui a une historicité. Mais mon projet absolu est surtout d'écrire l'Algérie d'aujourd'hui." Le fragmentaire, raconter une histoire au travers de plusieurs dimensions, lui viendrait alors "du nouveau-roman, dadaïsme, de Faulkner et bien d'autres écrivains".