La capitale du crime a connu, le week-end dernier, une opération combinée des deux corps de sécurité. “De mémoire d'Oranais, je n'ai jamais vu cela”, confie ce vieux. La soixantaine bien sonnée, ammi El Houari porte bien le nom de la ville qui l'a vu naître et qu'il aime plus que toute autre ville. La preuve, il a toujours rejeté les propositions d'aller vivre ailleurs. Peu importent les raisons qui l'ont persuadé de ne pas quitter la cité de Sidi El Houari. Ce soir, il est comme inquiet. Il n'arrive pas à comprendre ce qui se passe dans son quartier Douar-El-Hammar à Sidi El Bachir, l'un des coins les plus réputés d'Oran pour sa criminalité. Il y a de quoi, en effet, s'interroger sur une aussi importante présence de gendarmes et de policiers. Programmée depuis quelques jours, cette opération, initiée par la cellule de communication du commandement de la Gendarmerie nationale, se voulait essentiellement un signe manifeste de volonté commune des deux corps à conjuguer leurs forces pour lutter contre la criminalité et les fléaux sociaux. N'en déplaise à des chroniqueurs versés dans l'invective et l'art de dénigrer une action fondamentalement constructive. La petite criminalité peut devenir très dangereuse lorsqu'elle n'est pas traitée à ses débuts. Ammi El Houari, qui pensait ce soir que quelque chose de grave était arrivé dans son quartier, n'a pas pour autant été déçu. Voyant les policiers et les gendarmes quadriller le coin, son voisin lui apprend qu'un terroriste activement recherché avait trouvé une planque dans ce misérable quartier. Au cours d'une brève discussion, nous l'informons que les éléments des deux institutions républicaines sont là pour rechercher des repris de justice, des dealers, bref des gens nuisibles à la société. Il hoche la tête en signe d'acquiescement. Sidi El Bachir est un immense champ de constructions illicites où l'eau et le gaz posent problème. “Un véritable labyrinthe”, dira le capitaine Zerred. Sous les ordres du lieutenant-colonel Benaâmane et l'adjoint-chef de la Sûreté de wilaya, le commissaire divisionnaire Arbiche Hadj, gendarmes et policiers se déplacent respectivement à Haï Essabah et El Hassi. Les chiens pisteurs sont mis à contribution. La population est excitée. Des citoyens s'énervent et s'en prennent verbalement aux policiers qui tentent de les calmer. La caméra de Canal Algérie n'est pas la bienvenue. On se cache le visage pour éviter le zoom. “S'il vous plaît ne filmez pas. Ma future belle-famille risque de me prendre pour ce que je ne suis pas. Je vous jure que je me marie dans quelques jours”, crie l'un d'eux. Son voisin prend le relais en vociférant : “J'ai une femme et deux enfants et vous n'avez pas le droit de me filmer ni encore moins me prendre en photo.” Les gendarmes et les policiers le calment en lui expliquant qu'il ne sera pas reconnu à la télé. Le cameraman n'en démord pas. Il continue de faire son boulot sans trop faire attention. Dans la foulée, nous suivons les éléments de sécurité dans leurs interventions, quelques peu musclées, mais ont-ils le choix de faire autrement leur travail ? En trois heures, les éléments des deux corps ont réussi un spectaculaire coup de filet. Au niveau de la compagnie territoriale, un point de presse se tient aux environs de minuit. Le lieutenant-colonel Benaâmane annonce que du côté de la gendarmerie, 190 interpellations ont été opérées dont 6 pour consommation de stupéfiants, 14 port d'arme prohibée, 3 personnes recherchées pour association de malfaiteurs à Masserghine, 3 mandats de justice, 1 mandat d'arrêt et 1 pour création de débit de boissons sans autorisation. À son tour, l'adjoint au chef de la Sûreté de wilaya, Arbiche Hadj, annonce que sur 184 interpellations, il ressort que 18 personnes portaient des armes prohibées, 2 pour consommation de stupéfiants, 1 mandat d'arrêt, 3 pour conduite en état d'ivresse dont une personne sans permis de conduire. À la question de savoir si une telle opération, au vu de son succès, serait éventuellement renouvelée, les deux responsables n'ont pas caché leur enthousiasme : “Si le besoin se fait sentir, ces opérations seront multipliées.” En outre, le lieutenant-colonel Benaâmane fait savoir que le procureur d'Oran est sorti en personne pour s'enquérir de cette opération. L'officier supérieur précisera que la majorité des auteurs de ces délits habitent la périphérie d'Oran. Beaucoup de familles ont quitté leurs régions (exode rural) pour venir s'installer autour de la ville. Avec un taux de chômage frôlant les 30%, les agressions, le commerce des stupéfiants, les vols et autres délits sont devenus des activités lucratives. Il est minuit trente. Devant la compagnie, femmes, hommes et enfants, parents du groupe de jeunes arrêtés dans la soirée, attendent des nouvelles. Le regard inquiet, ils espèrent arracher la moindre information sur leurs enfants et leurs proches. Hausse des délits contre les personnes Dans un point de presse tenu dans la journée à l'Unité de sécurité routière (USR), le lieutenant-colonel Benaâmane a fait le bilan de la criminalité du 2e trimestre 2005 avec une comparaison avec le 1er trimestre. Ainsi, du 1er avril au 3 juin, les éléments spécialisés de la Gendarmerie nationale ont procédé au traitement de 229 affaires ayant abouti à l'arrestation de 269 personnes pour crimes et délits contre les biens. Comparativement, une baisse est enregistrée par rapport au 1er trimestre vu sur 449 affaires traitées, 485 personnes ont été arrêtées. En revanche, une légère hausse est constatée en matière de délits contre les personnes durant le 2e trimestre avec 514 affaires traitées et 490 arrestations, durant le 1er trimestre 481 affaires ont été traités et 458 personnes arrêtés. Notons que pour la première période, 6 affaires de meurtre ont été traitées et ces personnes arrêtées. Le conférencier devait expliquer que comme action préventive concernant le plan Delphine, il y a en renforcement du dispositif en moyens humains et matériels. Tous les axes routiers sont pris en charge par les unités routières et les unités territoriales. Abordant le sujet des estivants, il dira que la saison haute commence dans quelques jours. En conséquence, un dispositif spécifique est mis en place. Les agents n'interviennent que lorsqu'un accident survient. Les postes de plages sont fonctionnels depuis le 15 juin. Dans le volet accidents, les mêmes services ont enregistré 243 accidents corporels ayant conduit à la mort de 26 personnes et 341 blessés, soit une diminution des morts par rapport au 1er trimestre : 32 morts et 341 blessés sur 226 accidents corporels. Concernant le trafic de véhicules, il a été procédé à la saisie de 9 véhicules pour falsifications de documents dont 3 de type Mercedes de luxe. Par ailleurs, une horrible affaire de pédophilie, suivie d'homicide commis sur un bébé de 18 mois, est actuellement entre les mains de la justice. Quant au dossier foncier, le conférencier a déclaré que 8 dossiers (8 communes sur 28 que compte la wilaya) sont à l'étude. 4 010 EAC et EAI sont concernées par l'enquête. De la pêcherie aux Andalouses, la corniche vous salue S'étirant sur une trentaine de kilomètres, la corniche oranaise est l'une des plus belles du pays. En la longeant, l'envie irrésistible vous prend de faire trempette. Un panorama de rêve taillé entre le roc et le bleu azur. L'affluence atteint des pics en ce week-end de juillet. Pourtant, la saison haute ne s'est pas encore installée. Durant le mois d'août, Oran accueille quotidiennement 2 millions de visiteurs. Un nombre qui peut atteindre deux ou trois fois la population de toute la wilaya, estimée à 1,6 million d'habitants. Quelques kilomètres à peine en quittant le chef-lieu, des panneaux publicitaires vous accrochent avec leurs noms exotiques (Paradisco, Beach House...). Les plages se succèdent avec leur étendue à l'infini. Cap Falcon, les Dunes, Aïn Turck, Coralez, Bomo, l'Etoile, la Grande, Bousfer, Beau Rivage et... les Andalouses. À bord du 4x4 Tata conduit par l'adjudant Beltir Mecherki, chef de la brigade de Aïn Turck, nous suivons le déroulement du dispositif de sécurité publique mis en place dans le cadre du plan Delphine. Tout au long de la corniche, on constate une présence régulière au niveau de chaque localité avec, toutefois, un renforcement pour certains carrefours réputés points noirs en matière d'accidents, comme Coralez, Bomo et Bousfer. Nous nous accordons une petite pause sur le CW84 reliant les Andalouses, Aïn Turck et Fellaoucen à Oran. Les automobilistes sont pour la majorité satisfaits du dispositif. Les récalcitrants, des jeunes à bord de bolides, sont discrètement remis à l'ordre. Sur les plages, on ne badine pas avec la sécurité publique. À Coralez, une escale s'impose pour un contrôle de routine. Une ressemblance frappante avec la Madrague (Alger) avec ses villas style colonial et ses cabanons en arrière plan. “Corps à l'aise”, comme le surnomment les jeunes d'ici, est très fréquentée par les familles. Les filles en bikini, aux couleurs chatoyantes, se disputent le hit de la plus belle de la plage. Une inspiration de “Côte Ouest”, avec une connotation de bien de chez nous, rend le cadre agréable. Au loin, l'île Paloma, à quelque cinq kilomètres au large, invite à l'exotisme. Un charme particulier qui fait des lieux l'un des endroits les plus prisés par les Oranais. Omar Chemlal a 19 ans. Il est DJ professionnel. Durant le reste de l'année, il anime des fêtes. En été, il assure l'animation de cette plage où il a installé son matériel chez son frère qui détient un petit commerce d'alimentation “l'Emir El Bahr”. Les rythmes endiablés latino-égyptiens ponctués de rai emballent les estivants. “On croque la vie à pleins dents, tant que la sécurité est assurée”, lancera un jeune entouré de ses trois amis. Les gendarmes longent la plage en ayant l'œil sur les moindres suspects. Trois jeunes sont embarqués au poste pour consommation d'alcool sur la plage. Ils seront verbalisés. Un acte dissuasif, affirment les gendarmes. Un tour à la brigade d'El Ançor nous permet de constater que quatre jeunes sont arrêtés. Ils sont impliqués dans une affaire d'agression contre un jeune couple, commise la veille sur le CW91 reliant les Andalouses, Madegh (Aïn El Kerma) à cap Lindes. Le couple, qui était dans une voiture en bordure de la route, a été attaqué par les malfaiteurs en utilisant une arme blanche (couteau de boucher) avec laquelle l'homme a été, selon le rapport de la gendarmerie, sérieusement blessé et transféré de suite à l'hôpital. Parmi les agresseurs, un mineur de 17 ans et un étudiant de 26 ans en sciences commerciales, qui déclare être un proche du propriétaire du véhicule à bord duquel se trouvait le groupe. Dans le bureau du chef de brigade sont posés, sur une table, les pièces à conviction (couteau maculé de sang, une corde, des attaches en plastique, un poste-radio et deux téléphones portables). Aux Andalouses, les estivants n'en ont cure. Ils coulent des jours heureux. La canicule avec son taux élevé d'humidité n'empêche pas les familles de vivre au rythme des vacances. Dans la nuit, les voix de Houari Dauphin et de cheba Kheïra sont portées à des kilomètres à la ronde. Les belles de nuit rôdent en quête de clients potentiels. Le complexe est propre, même si les chambres sont exiguës. Un seul ennui : Impossible de prendre une douche à partir de minuit. Le bain de minuit n'est pas permis. A. F.