La Fête de la Victoire, jour du cessez-le-feu, le 19 Mars 1962, a été, cette année une aubaine pour les Algérois qui ont investi la rue en masse afin d'exprimer, une fois de plus, leur ras-le-bol du système de Bouteflika. Ils étaient en effet, des milliers à battre le pavé, dans une ambiance plutôt bon enfant. Les marcheurs se recrutent cette fois-ci, essentiellement parmi les étudiants, les lycéens et les membres des corps médical et paramédical de la santé publique. Le message de circonstance du contesté président Bouteflika, diffusé la veille, semble avoir attisé davantage la colère des citoyens hostiles à la prolongation de son mandat. Une volonté qu'il a réitérée dans son message contre vents et marées. Cela a, en outre, encouragé d'autres corps de la Fonction publique ainsi que des citoyens à se joindre à la manifestation pacifique d'hier. Il y avait également plusieurs militants de différents partis politiques et autres organisations. Il était à peine 10h lorsqu'un imposant rassemblement s'était déjà formé devant la Fac centrale. La marée humaine s'amplifiera, progressivement, jusqu'à l'esplanade de la Grande-Poste. Le tout se passe sous le regard passif, pour ne pas dire complice des contingents de policiers mobilisés depuis la première marche du 22 février dernier. Les milliers de marcheurs feront, sans coup férir, plusieurs fois la boucle entre la Grande-Poste et la place Audin, en empruntant, le tunnel de la Fac centrale, la rue Didouche-Mourad et l'avenue Pasteur. Ce qui a provoqué la fermeture de cet itinéraire à la circulation automobile durant toute la matinée. Les commerces sont, en revanche, tous restés ouverts. Comme un jour ordinaire. Visiblement collés à l'actualité, les manifestants n'ont pas manqué de produire des slogans factuels comme "Honte à vous d'aller chercher des soutiens à l'étranger !", allusion aux tournées menées à l'étranger par le vice-Premier ministre, Ramtane Lamamra, ou encore "À chaque pharaon, il existe un Moïse", allusion au président Bouteflika qui veut s'éterniser au pouvoir, sont parmi les slogans scandés à cette occasion. Le caractère pacifique rend la manifestation plutôt festive. Comme pour célébrer convenablement la Fête de la Victoire, des groupes de jeunes sont venus avec des "derboukas" et des tambours. Comme dans un stade de foot. Ils ont ainsi égayé la manifestation avec des chants rythmés, obligeant bien des badauds à se mêler, spontanément, à la foule. La présence en force des blouses blanches agrémentera davantage le décor haut en couleurs du drapeau national. Les banderoles et les pancartes aux slogans alliant humour, satire et dérision incitent souvent les passants à "dégainer" leurs smartphones. Ces scènes riches en couleurs et, surtout, en messages politiques, dureront jusqu'en fin d'après-midi. La foule occupera pendant longtemps l'esplanade de la Grande-Poste. Sans gêner, outre mesure, la circulation automobile et l'activité des commerces alentour. "La victoire est à nous" est le refrain le plus répété par les manifestants à l'occasion de la… Fête de la Victoire. "Non au prolongement du mandat présidentiel et non à la conférence nationale" tel est le message politique essentiel lancé aux tenants du pouvoir que les Algériens invitent poliment à… "dégager !". La marche d'hier, n'est qu'un exercice de répétition et de préparation pour le grand rendez-vous du… 5e vendredi, dans moins de quarante-huit heures.