Le chef de l'Etat, Abdelkader Bensalah, s'est engagé, devant le Congrès du Parlement, à mettre en place, en concertation avec la classe politique et la société civile, une institution nationale collégiale, souveraine dans ses décisions, à laquelle sera dévolue l'organisation du prochain scrutin présidentiel. Son statut d'intérimaire, aux prérogatives très réduites par rapport à un président de la République élu, lui permet-il d'entreprendre une telle démarche ? Selon l'ancien membre du Conseil constitutionnel, Ameur Rekhila, la loi fondamentale permet à Bensalah "d'exercer l'autorité organique. Il reste un chef d'Etat qui peut entreprendre des procédures d'ordre organisationnel". Abdelkader Bensalah a également assuré que le cadre juridique, afférent à cette institution nationale collégiale, va être élaboré et mis en forme dans les plus brefs délais. M. Rekhila précise que les conditions de sa mise en place doivent être impérativement fixées par ordonnance présidentielle et non par décret et ce, après la convocation du corps électoral. "Cette commission peut être installée dans quinze jours ou un mois", affirme-t-il. Un avis que ne partage pas la constitutionnaliste Fatiha Benabou, qui soutient qu'un président intérimaire n'a pas la prérogative d'élaborer un nouveau cadre juridique en raison de ses attributions très restreintes. "Il n'a pas le droit par exemple de promulguer par ordonnance, de consulter le peuple par voie référendaire, ni de réviser la Constitution", assure-t-elle. Elle explique que la seule haute instance de supervision des élections constitutionnalisée est celle qui était présidée par Abdelwahab Derbal. "Il y a deux articles de la loi fondamentale qui parlent de cette haute instance de surveillance des élections. Seulement, ses missions étaient limitées au contrôle et non à la gestion et à l'organisation des scrutins. J'ai demandé à l'époque au chef de l'Etat de réviser la loi fondamentale dans cet aspect-là, afin que les membres de cette instance ne soient plus nommés par lui, mais choisis par la société civile. J'ai également demandé que le ministère de l'Intérieur et, par ricochet, les walis soient écartés du processus électoral. Mais il ne m'a pas écoutée." Fatiha Benabou se demande si Bensalah ne va pas "remettre en selle cette haute instance en changeant juste sa composante". "À ce moment-là, précise-t-elle, il devra l'élargir aux associations et organisations comme le Raj et la Laddh opposés au pouvoir en leur accordant préalablement un agrément. Sinon, ça ne sert à rien." Elle pense, néanmoins, que la mission principale du chef de l'Etat reste la convocation du corps électoral. Nissa Hammadi